Il aura eu la particularité d'avoir laminé plus d'une bourse tout en mettant en évidence une gestion approximative des préoccupations citoyennes de la part des pouvoirs publics. Les Algériens doivent trouver, sans conteste, le temps long, non pas parce que leur conviction et leur ferveur religieuses aient baissé d'intensité mais tout simplement à cause de toutes ces nombreuses dépenses, rituelles, auxquelles ils doivent faire face. Ramadhan, rentrée scolaire, et les dépenses si particulières qui couronnent la fin du mois sacré: l'Aïd El Fitr (gâteaux et achat de vêtements neufs pour les enfants...). La flambée des prix a fait et continuera à faire des ravages. Sur ce plan, ils savent désormais à quoi s'en tenir. Ils ne peuvent compter que sur leur porte-monnaie et à condition qu'il puisse encore contenir quelques dinars. A défaut, les plus audacieux pourront se rabattre sur les restaurants de la Rahma. En ce qui concerne le couffin du Ramadhan, les listes sont déjà bouclées à ce qu'il parait. Il y en aura pour seulement...1.200.000 démunis. Les autres devront espérer cette accalmie de l'envolée des produits de consommation tant promise - quand bien même elle est tardive - par les responsables concernés par la régulation et le contrôle des marchés, à commencer par le ministère du Commerce, celui de l'Agriculture, l'Union générale des commerçants et artisans algériens...Cette dernière avait d'ailleurs avoué son impuissance avant que les «hostilités» ne soient ouvertes. Une manière de jeter l'éponge dès l'entame du défi à relever: juguler la flambée des prix et faire échec à la spéculation. «Nous n'avons aucun pouvoir de décision, notre rôle est seulement de sensibiliser», a déclaré son secrétaire général. Et comment espérait-il s'y prendre? «Nous allons, à travers la presse, nous faire entendre de la part de ceux qui ont un pouvoir de décision auxquels nous lançons un message pour qu'ils prennent des mesures dans le sens de l'organisation du marché et de la répression des commerçants contrevenants», a souligné Salah Souilah à quelques jours du début du mois sacré. La presse écrite dans son ensemble a pris à bras-le-corps la question et continue à en faire quotidiennement la «une» de ses manchettes. Le président de la République a fait le reste, l'essentiel. Au cours du Conseil des ministres qu'il a présidé le 26 août, Abdelaziz Bouteflika a sévèrement rappelé à l'ordre le ministre du Commerce. «J'entends qu'aucune règle de liberté du commerce ne soit évoquée à l'avenir pour justifier la limitation de la capacité de l'Etat à imposer des pratiques commerciales loyales et à réprimer les spéculations qui nuisent aux citoyens...» Le SG de l'Ugcaa avait pourtant affirmé avec assurance, trois semaines auparavant, qu'«il n'y a pas de loi qui fixe les prix des produits.» Maladresse ou manque de maîtrise des subtilités et de l'art de la communication? Cela ressemble beaucoup plus à une brèche ouverte pour les spéculateurs de tout acabit, qu'à une campagne de sensibilisation en faveur d'une pratique de prix raisonnables. Il y a de fortes chances pour que ce soit interprété dans ce sens. Sur ce terrain, il ne fait pas figure de prototype. A titre d'exemple et à ce propos, les silences de la Centrale syndicale est édifiant. Si l'on évacue de son objectif premier la défense du pouvoir d'achat des travailleurs qui demeure son essence par excellence, il n'en restera dans pareil cas qu'une coquille vide. La suppression du crédit à la consommation, qui vise à protéger les consommateurs de l'endettement, n'a pas convaincu grand monde, quand bien même elle ne toucherait qu'une catégorie sociale. Du côté de l'ancien Foyer civique, on y a adhéré presque spontanément. De nombreux citoyens l'ont vécu comme une forme d'infantilisation. Vouloir protéger l'économie et favoriser la production nationale est une initiative louable. Elle est l'affaire de tous et personne n'en détient le monopole. Comme l'est la gestion de l'épidémie de la grippe A/H1N1. L'Algérie n'a pas été épargnée comme elle ne fut d'ailleurs pas épargnée par la crise financière internationale. On a pourtant voulu pendant longtemps nous faire croire le contraire. Pour nous rassurer, disait-on. Dire les choses telles qu'elles sont, aussi crues soient-elles, c'est aussi responsabiliser la société dont on a la charge et le destin en main. En ce sens, les sorties médiatiques du président de la République sont à sérieusement méditer pour de nombreux responsables. «Nous allons droit dans le mur», avait-il prévenu, sans hésitation, il y a tout juste une année. La formule est plus que jamais de mise, quant à la flambée des prix, la pilule est difficile à avaler.