Pour redresser la situation, deux grandes recommandations: la protection des civils doit primer sur la chasse aux taliban et priorité à la formation de l'armée et de la police afghanes. Les ministres de la Défense de l'Otan planchaient hier sur une nouvelle «approche» de la guerre contre-insurrectionnelle en Afghanistan, qui a tout d'un début de «stratégie de sortie» pour les forces internationales. Alors que leurs troupes essuient des pertes record face aux taliban, - plus de 400 morts depuis le début 2009 - le commandant en chef de la force internationale en Afghanistan (Isaf), le général Stanley McChrystal, est venu devant les 28 alliés réunis à Bratislava défendre le rapport qu'il leur a transmis fin août. Pour redresser la situation, il fait deux grandes recommandations: la protection des civils doit désormais primer sur la chasse aux taliban, et la priorité doit être donnée à la formation d'une armée et d'une police afghanes capables de prendre le relais. Ainsi, les troupes étrangères ne risqueront plus d'être perçues comme une force d'occupation par les Afghans. Et en Occident, l'opinion publique ne s'interrogera plus comme elle le faisait de plus en plus, selon les sondages, sur le bien-fondé d'une intervention internationale dont l'issue était tout sauf évidente. Pour appuyer ces orientations, le général McChrystal ne fait pas mystère par ailleurs de son intention de demander des renforts aussi bien à son pays qu'aux autres alliés. En ouvrant la réunion, le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen a estimé que si les citoyens des pays alliés «voient que nous progressons, qu'il y a une lumière au bout du tunnel, ils soutiendront aussi longtemps que nécessaire» l'action menée en Afghanistan, malgré ses difficultés. Cette «lumière», selon lui, consistera à «commencer à transférer dès que possible» les responsabilités militaires aux troupes afghanes au terme d'une période de transition, district après district, province après province. Une démarche qu'à son arrivée à la réunion, le ministre danois Soren Gade a carrément qualifiée de «stratégie de sortie». Si M.Rasmussen a reconnu qu'il «était trop tôt pour avoir des réponses définitives» aux questions soulevées par ce rapport, il a dit espérer que les ministres pourraient s'entendre sur trois points essentiels à ses yeux. «Croyons-nous que l'approche du général McChrystal est la bonne, deux, croyons-nous que nous devions accélérer la transition vers la prise en main par les Afghans (du premier rôle militaire), et trois, comment allons nous mettre en oeuvre au mieux nos priorités?». La veille, le secrétaire américain à la Défense Robert Gates a insisté sur le caractère surtout «consultatif» des délibérations d'hier. Avant de se positionner, les alliés européens de Washington sont suspendus à la décision que doivent prendre les Etats-Unis sur l'envoi ou non des renforts de 10.000 à 40.000 hommes que le général McChrystal demanderait à son gouvernement. Les troupes internationales -Isaf et opération américaine Liberté immuable- dépassent aujourd'hui les 100.000 hommes, après un premier renfort de 21.000 soldats américains cette année. D'autre part, le second tour de la présidentielle afghane doit se tenir le 7 novembre. Le ministre néerlandais Eimert Van Middelkoop a jugé qu'avant de statuer sur la suite «il était sage d'attendre les élections à Kaboul, -la légitimité (du gouvernement) en Afghanistan ayant un caractère clef-, ainsi que la décision du président Obama». Selon lui, c'est la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Otan, les 3 et 4 décembre prochains à Bruxelles, qui sera décisionnelle. Son collègue allemand Franz Josef Jung s'est voulu optimiste: «Il n'est pas trop tard. Nous avons besoin d'une stratégie claire, d'un objectif clair et d'une définition claire de la manière d'y parvenir», a-t-il assuré.