Pour de nombreux responsables d'hôtels et de complexes touristiques de cette ville, la saison estivale 2002 est une véritable catastrophe. «Cette saison est pire que celle de l'année 2001 où il y avait eu, en plus des émeutes, le deuil décrété par laârch» se plaint le réceptionniste de l'hôtel Le marin situé à l'entrée de la ville. Notre interlocuteur, la cinquantaine passée, enchaîne ave on amer: «La presse nous a ruinés avec la désinformation qu'elle a colportée pendant deux ans sur cette région et la Kabylie en général.» A quelques centaines de ètres se dresse Le Méditerranée, un autre hôtel familial où l'on entend le même son de cloche et où l'on fait le même constat. «On n'arrive plus à convaincre les familles qui appellent à partir des autres wilayas pour prendre leur réservation». «Dès qu'on tente de les rassurer sur la situation qui prévaut au niveau de la région, elles nous répliquent par les titres à la ‘‘une'' de la presse qui a contribué à la dramatisation de la région», nous déclare un responsable de l'hôtel. Le réceptionniste du Méditerranée poursuit: «Le mouvement citoyen ne s'est jamais attaqué aux estivants, au contraire, il les a aidés en l'absence de la Gendarmerie en assurant la sécurité, mais les gens ont une image tellement diabolisée qu'ils préfèrent parfois aller dans un fief terroriste qu'en Kabylie.» La ville d'Azeffoun située à environ 60 km au nord-est de la wilaya de Tizi Ouzou, a connu, elle aussi, des émeutes, a vu le départ de la brigade de gendarmerie (redéployée selon la terminologie officielle), et la décision de l'expulsion des chefs de daïra a fait le tour des villages. Cette dernière «décision» a beaucoup contribué, selon les responsables des hôtels, à la défection d'un très grand nombre de familles habituées à cette ville d'artistes. On invoque d'autres raisons ayant entraîné l'échec de cette saison estivale, qui n'a réellement commencé que vers la mi-juillet. La route menant vers Azeffoun, est devenue un véritable mouroir. En l'espace d'une semaine, cinq jeunes ont été fauchés par un véhicule ayant raté un virage, et deux autres pères de famille tués sur le coup par un chauffard qui «faisait du rallye sur une Route nationale». Il y a aussi la réapparition des groupes terroristes au niveau de la forêt de Mizrana (à 20 km d'Azeffoun) et où les éléments de l'ANP sont en perpétuel ratissage. Mais en réalité, la saison estivale a été compromise bien avant l'avènement de l'été. Déjà durant les mois d'avril et mai, les estivants avaient choisi leur destination. Un responsable du camp familial Dahbi, implanté depuis des années à Azeffoun, déclare à ce propos: «Cette année, on a pris un risque, on a ouvert en juillet après une longue hésitation, mais les familles qu'on reçoit ont confiance en nous, il y a un problème politique en Kabylie, mais il y a aussi la quiétude.» Pourtant, la ville et la plage semblent bondées de monde. «Ce n'est pas le monde d'un vendredi caniculaire du mois d'août, on est très loin du compte», s'est contenté de dire le responsable du Marin désabusé.