Le Makhzen a visiblement épuisé toutes les voies diplomatiques pour user des voies artistiques. Invité lors d'une émission de divertissement sur la chaîne tunisienne Nesma TV, le comique franco-marocain Jamel Debbouze a profité de l'occasion pour lancer des messages politiques au gouvernement algérien: «Je demande aux autorités algériennes d'ouvrir les frontières avec le Maroc», avant d'ajouter: «Ce n'est pas normal qu'une partie du Maghreb possède de l'essence et les autres des bidons vides.» C'est la première fois que Jamel Debbouze s'exprime ouvertement sur ce sujet, se mettant ainsi au service du roi du Maroc, lequel n'a pas cessé depuis plus de trois ans, de revendiquer l'ouverture des frontières. Cette annonce faite à partir de Tunis n'est pas spontanée, mais visiblement réfléchie puisque l'humoriste franco-marocain a introduit cette annonce lors d'une émission très regardée en Algérie. Une demande probablement introduite à la demande du Makhzen, qui a visiblement épuisé toutes les voies diplomatiques pour user des voies artistiques. Le gouvernement algérien connaît bien l'humoriste franco-marocain. Il lui avait, à plusieurs reprises, refusé un visa d'entrée pour assurer son spectacle à Alger ou encore pour présenter son film Indigènes en 2006. L'Etat algérien lui avait pourtant accordé un visa d'entrée provisoire de deux semaines pour les besoins du tournage, à Sétif, du film Les Hors la loi à la demande du réalisateur algérien Rachid Bouchareb. Le gouvernement algérien avait conditionné cette demande par l'interdiction de rencontrer la presse algérienne ou de faire la moindre déclaration allant à l'encontre de la politique algérienne. Mais lors de l'émission de Nass Nesma de Nesma TV, Jamel Debbouze ne s'est pas contenté de faire la comédie. Il s'est présenté comme le porte-parole du Royaume marocain se faisant l'écho de la demande marocaine d'ouvrir les frontières de l'Ouest quelques semaines après la fin du tournage, à Sétif, du film Les Hors la loi de Rachid Bouchareb et sa poursuite à Tunis. Auparavant, l'Algérie avait toujours refusé un visa d'entrée en Algérie au comédien Jamel Debbouze qui ne possède pas de passeport marocain. Ce refus était motivé, à l'époque, par les responsables algériens par son soutien à la politique marocaine dans le conflit du Sahara occidental. Cependant, une fois ayant quitté le territoire algérien, Jamel Debbouze se lâche et dit tout haut, en Tunisie, ce qu'il pensait tout bas en Algérie. Ce dernier ne s'est pas contenté de demander l'ouverture des frontières. Pis encore, il s'est permis de critiquer Cheb Mami, actuellement en prison en France. En fait, s'il a ciblé Mami et pas Khaled, c'est parce qu'il sait que l'ancien prince du raï avait de très bons rapports avec le gouvernement algérien, autrement dit, il était considéré comme le Jamel Debbouze d'Alger. Néanmoins, Jamel Debbouze n'est pas la première personnalité marocaine à demander l'ouverture des frontières. Le mois de septembre 2008, l'écrivain marocain Tahar Benjelloun avait appelé à l'ouverture des frontières en vue de permettre aux jeunes des cinq pays de la région de «créer un seul et grand Maghreb, uni, démocrate et moderne». Mais l'ouverture des frontières ne sera jamais le fait du roi des artistes marocains et passera indéniablement par le règlement du contentieux par la diplomatie internationale.