En dépit des apparences et des grandes orchestrations officielles, la mondialisation est encore balbutiante dans les pays développés; dans nos pays au revenu national faible, elle est une utopie en voie. Il n'empêche que - ou à cause de cela et à juste raison -, depuis quelque temps déjà, les chercheurs de nos universités se sont mis à accélérer le branle-bas indispensable pour analyser, expliquer, discuter et prévenir le formidable et irrésistible processus d'internationalisation des échanges économiques dans le vaste contexte actuel de la mondialisation. Aussi, en publiant le tome 1, intitulé Mondialisation et nouvelle culture économique de son ouvrage complet L'Algérie face aux défis de la mondialisation(*), Abderrahmane Mebtoul, docteur d'Etat en sciences économiques, actuellement chargé de mission auprès du président-directeur général de Sonatrach, entend-il préciser dans son introduction générale: «Je livre à l'opinion nationale et internationale cette très modeste expérience, produit d'un universitaire et d'un praticien de l'économie.» A cette fin, et pour cerner le sujet de son oeuvre dont «La problématique générale est l'Algérie face aux défis de la Mondialisation», notre auteur conçoit deux volumes. «Le premier volume (que je présente ici), relatera la mondialisation comme rapport social loin de la vision étroite des catégories marchandes» et comprend deux parties: 1- La rupture par rapport à l'idéologie étatiste-populiste où apparaîtra, sous la direction de cet auteur, le programme de l'Association de Développement de l'Economie de marché (ADEM). 2- L'Algérie face aux mutations mondiales. Dû «à trente années d'expérience sur le terrain», ce travail d'approche personnelle et très critique est livré, comme l'écrit A.Mebtoul, «en premier lieu aux étudiants, futurs cadres de demain, universitaires, dans la mesure où l'Université a un rôle stratégique à jouer afin de véhiculer une nouvelle culture économique et politique», et tout en constatant «que les manuels existants sont largement inadaptés aux nouvelles réalités économiques». Et l'auteur d'ajouter encore: «Ce travail s'adresse également aux opérateurs économiques publics privés ainsi qu'aux responsables économiques afin qu'ils puissent éviter certaines erreurs de politique économique qui peuvent se chiffrer en milliards de dollars supportés en dernier lieu par l'ensemble de la population algérienne.» L'ambition de l'ouvrage est donc d'aller loin - et dans un sens large - dans son objet duquel l'idéal de la communication exige des arguments à la fois forts et lumineux pour éclairer tous les publics. C'est ainsi que pendant longtemps, notre auteur prolifique a recouru à la publication d'articles dans la presse nationale et internationale sur «différents thèmes qui sont aujourd'hui d'une actualité brûlante». Sans doute, le temps donne toujours raison à la raison, mais le temps, permettant aussi assez de recul à la réflexion née dans l'immédiateté, peut être mis en cause. N'est-ce pas là la loi universelle de l'évolution des idées dans le temps même où elles émergent? Et c'est peut-être là que les contributions de Abderrahmane Mebtoul tirent l'oeil, méritent attention et appellent aux débats contradictoires que lui-même souhaite. Les enjeux de la mondialisation étant nombreux et divers, l'objectif de transformation de ce qui existe implique des adaptations aux évolutions qui autorisent ou engendrent une correction ou une redéfinition des stratégies existantes, et assurément, exigent aussi de nouvelles stratégies spécifiques pour notre pays. Mais ces enjeux, tous typés, tous connus, tous inventoriés se compliquent surtout à cause des séquelles de «la longue période économique monopoliste et protectionniste » bien analysée par d'au-tres chercheurs algériens dont j'ai évoqué ici même les brillants travaux et qui démontrent ce que l'on pourrait appeler l'intégration à l'amiable de ces deux concepts de même nature «mondialisation» et «modernisation», car ils sont dans les faits une seule et même chose. Individuellement, mais souvent regroupés par affinités de conviction et parfois même en concertation avec des praticiens, nos chercheurs s'évertuent à examiner des modèles d'actions initiées sur le terrain de l'expérience et proposent des solutions - au reste toutes relatives, quelques-unes trop prudentes, quelques autres trop hardies. La réflexion sur l'économie échangiste est alors comme l'homme ingénieux et sage que le destin ou les simples moyens d'existence ont mis sur une corde raide placée au plus haut de ses espérances; et il avance, tantôt poussé par beaucoup de cris d'adhésions enthousiastes, tantôt freiné par beaucoup de cris de mécontentement, voire par beaucoup de cris de franche résistance. Evidemment, notre pays a fait son choix. Pour ne pas sombrer dans l'isolement et accumuler des retards préjudiciables à son développement et à son existence même, il proclame son engagement dans de profondes réformes tous azimuts. Car, bon gré mal gré, il doit s'ouvrir au monde - par exemple, sa position géographique le commande - et s'assimiler les technologies modernes afin de se donner les solides arguments de son indépendance et de s'affirmer davantage dans les domaines essentiels visés par la mondialisation. Bien plus, certaines tendances prônent «une position courageuse» de rupture claire et nette avec les «pratiques du système monopoliste rentier pour l'instauration d'une véritable économie de marché concurrentielle à base de concertation sociale dans le cadre de l'interdépendance mondiale». Et c'est aussi cela l'argumentation ardente de A.Mebtoul pour convaincre de «l'urgence de l'adaptation de l'Algérie aux mutations mondiales». En essayant d'expliquer le nécessaire renouveau, fondé sur des réformes économiques et une privatisation saine, Abderrahmane Mebtoul re-prend en toute fidélité le questionnement populaire sur l'inflation et le chômage, et point par point tout ce qui touche aux politiques sectorielles abîmées (industrie, agriculture, éducation, habitat, santé, transport, tourisme, arts, culture, édition - et celle du livre que j'aime le plus) et dont le citoyen est le souffre-douleur, hélas! Enfin, notre auteur précise encore que dans ce tome 1 de L'Algérie face aux défis de la mondialisation, il a réuni l'essentiel de ses «réflexions parues dans des revues spécialisées ou la presse nationale et internationale entre 1991-2001». Cependant, autant le discours est copieux, direct et habile, autant certaines critiques, si nécessaires soient-elles, et sans doute émises de bonne foi universitaire, sont surprenantes, me semble-t-il, car elles n'offrent pas de recours a posteriori à l'objet dont elles ont envie. Un exemple? L'article (p.107) visant «les propos de Abdelmadjid Bouzidi transmis à l'Entv en date du 10 novembre 1994 n'arrivant pas toujours à discerner s'il engageait la Présidence ou c'étaient des analyses théoriques d'un universitaire...» (sic). Suivent, présentés par A.Mebtoul, les arguments «retenus» de l'un et de l'autre. Eh bien, voilà peut-être une belle réaction en perspective de M.Abdelmadjid Bouzidi, professeur d'économie, pour situer dans leur contexte - et à l'intention de nos lecteurs -, ses propos qui ont fait l'objet de l'article intitulé La prétendue économie de marché étatique est un slogan idéologique des monopoleurs étatistes.