Il devient ainsi le troisième haut responsable politique du régime, sur les quatre qui restent aujourd'hui en vie, à devoir répondre de l'accusation de génocide. L'ex-chef d'Etat khmer rouge (1975-79), Khieu Samphan, a été à son tour inculpé hier de génocide devant le tribunal de Phnom Penh parrainé par les Nations unies, après des poursuites similaires à l'encontre de deux autres dirigeants du régime totalitaire. Khieu Samphan, 78 ans, «a été amené devant la Cour et informé que les poursuites à son encontre avaient été étendues à l'accusation de génocide contre les Vietnamiens et (la minorité musulmane) des Chams», a indiqué Lars Olsen, porte-parole du tribunal. Il était jusqu'à présent poursuivi pour crimes de guerre et crime contre l'humanité. Il devient ainsi le troisième haut responsable politique du régime, sur les quatre qui restent aujourd'hui en vie, à devoir répondre de l'accusation de génocide. Lundi, le numéro deux et idéologue du régime de Pol Pot, Nuon Chea, s'était vu notifier la même charge, suivi mardi par l'ex-ministre des Affaires étrangères, Ieng Sary. Tous trois sont détenus dans une prison attenante au tribunal et doivent être jugés, en principe en 2011, avec Ieng Thirith, l'ex-ministre des Affaires sociales du «Kampuchéa démocratique» et épouse de Ieng Sary. Khieu Samphan, défendu notamment par l'avocat français Jacques Vergès, se présente comme un intellectuel patriote, tenu à l'écart du «noyau dirigeant» ultra-secret des Khmers rouges. Hier, les juges l'ont aussi inculpé de meurtres, tortures et persécutions religieuses, conformément à une loi du Code pénal cambodgien. «Je n'ai rien à dire sur les inculpations, c'est le droit des juges», a déclaré son avocat cambodgien Sa Sovan. «Si les responsables de la cour comprennent la justice, j'espère qu'il sera libéré». Au total, jusqu'à 2 millions de personnes, soit un quart de la population du Cambodge de l'époque, sont morts sous la torture, d'épuisement ou de malnutrition pendant cette période. Les massacres contre la population khmère par le régime ultra-communiste ne sont eux-mêmes pas assimilables à un génocide selon l'ONU, qui ne retient que des crimes «commis dans l'intention de détruire, intégralement ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux». Le magistrat instructeur a en revanche estimé que les Khmers rouges avaient bien tenté d'exterminer le peuple cham, principalement installé dans les provinces du centre du pays et dont 100.000 à 400.000 membres ont été massacrés, selon les historiens. Quant aux Vietnamiens, aucune estimation précise du nombre de victimes n'est disponible. «Les Khmers rouges considéraient les Vietnamiens comme des ennemis historiques, des ennemis de la race», a estimé hier Youk Chhang, directeur du Centre de documentation du Cambodge. Ce procès des quatre plus hauts dirigeants vivants du régime est le deuxième prévu devant la Cour mise en place en 2006 après d'interminables négociations entre le Cambodge et la communauté internationale. L'enquête devrait être close d'ici quelques semaines. En novembre, l'accusation a réclamé 40 ans de prison à l'encontre de Kaing Guek Eav, alias Douch, patron de la prison de Tuol Sleng à Phnom Penh, dans laquelle quelque 15.000 personnes ont été torturées puis exécutées. Douch est notamment accusé de crimes de guerre et crime contre l'humanité. Le verdict est attendu au premier trimestre 2010.