Les opérations du PAM «sont la cible croissante des attaques des groupes armés, obligeant à la suspension des distributions d'aide alimentaire», a indiqué hier l'agence onusienne dans un communiqué. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a suspendu hier, jusqu'à nouvel, ordre ses activités dans le sud de la Somalie sous contrôle des insurgés islamistes, y dénonçant la multiplication des «attaques et menaces» contre ses opérations humanitaires et ses personnels. Les opérations du PAM dans le Sud somalien «sont la cible croissante des attaques des groupes armés, obligeant à la suspension des distributions d'aide alimentaire» dans cette partie du pays, selon un communiqué de l'agence onusienne. «Les bureaux du PAM à Wajid, Buale, Garbahare, Afmadow, Jilib et Beletweyne ont été temporairement fermés. Les stocks alimentaires, les équipements de l'agence et ses personnels ont été évacués vers des zones plus sûres», indique ce communiqué. «Les attaques récentes, les menaces, le harcèlement et les exigences financières des groupes armés (...) rendent virtuellement impossible l'accès à près d'un million de personnes vulnérables», selon le PAM. Insistant sur son rôle «impartial et non politique», l'organisation onusienne se dit «profondément inquiète de l'augmentation de la famine et des souffrances des plus vulnérables en raison des attaques inhumaines sans précédent contre des opérations humanitaires». Elle continuera cependant à fournir une assistance alimentaire à 1,8 million de personnes dans le reste du pays (et notamment à Mogadiscio), soit deux tiers des personnes visées par ses programmes. Sous l'influence croissante de jihadistes étrangers, les insurgés radicaux shebab en lutte contre le gouvernement somalien (TFG) se font depuis plusieurs mois de plus en plus menaçants sur les rares organisations humanitaires internationales opérant encore en zone islamiste, dans le centre et le sud de la Somalie. Dans son communiqué officiel, le PAM ne fait aucune référence directe aux shebab pour justifier la suspension de ses activités. Mais il dénonce sans ambiguïté les «demandes inacceptables des groupes armés qui exigent de l'argent en échange de notre sécurité et aussi de ne pas employer des femmes», selon l'une de ses porte-parole, Emilia Casella, basée à Genève. Début novembre, les shebab avaient annoncé la mise en oeuvre imminente dans leur fief de Bay et Bakool (200 km au nord-ouest de Mogadiscio) d'une nouvelle réglementation imposant «onze conditions» drastiques aux ONG et agences de l'ONU. Ces conditions, qui ne sont pas sans rappeler la législation ultrarépressive imposée aux ONG sous le régime des taliban à Kaboul (1996-2001), exigent que les humanitaires cessent d'«interférer avec la religion islamique», qu'ils licencient leurs personnels féminins et qu'ils paient tous les six mois «une taxe» d'au moins 20.000 dollars. La décision du PAM fait suite également à une série d'incidents: grenades jetées à deux reprises en décembre sur le bureau de l'ONU à Mogadiscio, menaces d'attaques suicide, assassinat le 22 décembre à Beletweyne d'un employé local en charge de la sécurité... Le 30 décembre, un compound du PAM était brièvement occupé par les shebab à Buale. Le jour-même, un convoi de 9 camions chargés de 350 tonnes d'aide alimentaire était stoppé par les islamistes au sud de Mogadiscio, puis finalement autorisé à poursuivre sa route en échange d'une «taxe» versée à un émir local. Fin décembre, les shebab s'étaient emparés des locaux à Baïdoa d'une agence de l'ONU spécialisée dans le déminage (Unmas), après en avoir interdit les activités au motif qu'elle aurait notamment «incité (...) à la rébellion contre l'administration islamique». En juillet, les shebab avaient déjà interdit à trois organismes des Nations unies (Pnud, Unpos et Undss), qualifiés d'«ennemis de l'Islam», de travailler en Somalie et leurs locaux avaient été pillés.