Plus de 600.000 travailleurs de différents secteurs crient leur désarroi. L'euphorie générale provoquée par les exploits de l'Equipe nationale ne sera pas l'arbre qui cache la forêt. Le front social bout comme un volcan qui peut se réveiller à tout moment. Et l'explosion peut faire mal, très mal. Scandales financiers, grèves, manifestations, tous les ingrédients sont réunis pour une révolte. Aux avant-postes du front, se trouvent les travailleurs dans des secteurs stratégiques. 600.000 d'entre eux sont en pleine contestation. Il suffit d'une étincelle pour que le feu de l'émeute s'embrase. Les indices sont au rouge. Dans le secteur de la santé, un rassemblement national est prévu demain par le Syndicat national des praticiens de la santé publique (Snpsp), devant l'hôpital Mustapha-Bacha, à Alger. «Ce rassemblement s'inscrit dans le cadre du mouvement de protestation que nous avons enclenché depuis plusieurs semaines», a déclaré hier, le Dr Lyès Merabet, président du Snpsp. Joint par téléphone, ce dernier a dénoncé le traitement réservé par le ministère de la Santé aux praticiens grévistes. «Face à nos doléances, le ministère répond par la répression», fulmine le Dr Merabet. Il cite les ponctions sur salaires, les intimidations dont sont victimes les représentants du syndicat à l'échelle nationale et les entraves faites pour empêcher le Snpsp de tenir ses réunions. Le débrayage du Snpsp a touché une vingtaine de villes à l'échelle nationale. Pour rappel, le secteur de la santé publique compte près de 80.000 praticiens. Sur cet ensemble, le Snpsp revendique plus de 10.000 adhérents. C'est dire l'ampleur du mouvement. Surtout qu'il intervient dans un contexte particulièrement délicat, celui d'une campagne tumultueuse de vaccination contre la grippe A/ H1N1. Annoncée en grande pompe, cette campagne a suscité réticence et inquiétude parmi les citoyens. La vaccination ne dépasse pas un taux de 5% de la population visée. A ce titre, l'efficience du vaccin, voire son innocuité sont mises en cause. Ainsi, des zones d'ombre entourent le décès de certaines personnes après leur vaccination. Le secteur de l'éducation vit, lui aussi, au rythme des grèves et autres actions de protestation. Le Conseil des lycées d'Algérie annonce une journée de protestation le 27 janvier prochain. Deux autres journées de grève seront observées en février prochain. Le CLA veut passer à une autre forme de protestation et menace d'une grève ouverte à partir du mois d'avril. «Notre mouvement continuera tant que la tutelle restera sourde à nos revendications», a indiqué, hier au téléphone, M.Idir Achour, porte-parole du CLA. En somme, l'année 2010 ne sera pas de tout repos pour le secteur de Benbouzid qui emploie près de 500.000 travailleurs. Dans ces deux secteurs d'activité, il y a aussi les sages-femmes et les adjoints d'éducation qui persistent dans leur menace de suivre l'exemple d'autres travailleurs en initiant des mouvement de protestation. Le prolétariat n'est pas en reste dans d'autres secteurs. L'illustration en est donnée par les 5000 travailleurs de la Société nationale des véhicules industriels de Rouiba (Snvi). Ils ont suspendu leur débrayage, mais à condition que leurs revendications soient satisfaites. Idem pour les 7200 employés d'ArcelorMittal de Annaba. A l'appel de leur syndicat, ils observent une grève depuis près d'une semaine. Ainsi, le complexe est complètement paralysé. Cette grogne des travailleurs n'est pas le seul phénomène qui caractérise le pays. Ces derniers jours, on assiste aussi à des déballages publics sur des scandales financiers, ce qui ne fait qu'empoisonner le climat social. Cette fois, c'est Sonatrach, qui assure 98% des recettes des exportations et plus de 60% des rentrées fiscales, qui est ébranlée par une affaire de malversation lors de passation de marchés. M.Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines, indique avoir été informé de cette affaire par le biais de la presse, jetant un peu plus le discrédit sur la classe politique au moment où c'est la recherche de compromis qui devrait être privilégiée.