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«Je me reconnais dans tous mes personnages»
HAMID GRINE PRESENTE SON DERNIER OUVRAGE
Publié dans L'Expression le 30 - 01 - 2010

«C'est un coup de coeur en pensant au journaliste de base. Cette inversion des valeurs ce n'est qu'en Algérie que je l'ai constaté, un bon journaliste doit bénéficier d'un bon salaire et d'une belle vie...», dira l'invité de l'Onci.
Pour sa première rencontre littéraire baptisée «Parution», l'Office national de la culture et de l'information, l'Onci a invité l'écrivain Hamid Grine pour parler de sa dernière oeuvre Il ne fera pas long feu (Editions Alpha) qui traite des méandres du milieu de la presse nationale. Afin de le présenter, l'Onci a fait appel au journaliste et critique littéraire Madjid Bekhouche qui décortiquera le livre et en donnera une analyse pertinente.
«Pour certains, il s'agit d'un livre qui pose le problème de la corporation. C'est une fiction en rapport avec la réalité, mais cela reste un roman qu'il faut apprécier du point de vue de l'écriture et de la trame qui anime les personnages» dit-il. Ancien journaliste, Hamid Grine fera remarquer que ce livre est né alors qu'il préparait trois autres romans, mais celui-ci il l'a écrit d'une traite, le sujet s'est imposé à lui du fait qu'il l'intéresse au plus haut point eu égard à son métier qui le met en constante relation avec des patrons de journaux et notamment des journalistes dont il compte de nombreux amis, lui l'ancien journaliste sportif. Hamid Grine pointera du doigt certains journaux - sans les nommer - qui tirent à peine 1000 exemplaires et dont leurs patrons qualifiés de «begars», se croient intéressants en «tirant» à boulets rouges sur tel ou tel. Hamid Grine relèvera les dures lois du marché qui font qu'un journal a plus d'impact qu'un autre quand sa frappe de visibilité est plus importante que d'autres. Evoquant son personnage Hassoud, celui-ci a, certes, plein de défauts, dira-t-il, mais il aime sa mère. «Tout est relatif. Mon personnage est négatif, mais dans la presse, je n'ai pas encore vu quelqu'un qui menacerait de sortir un dossier en contrepartie d'un bon article. Hassoud ne fait pas de chantage à la pub. Il menace de sortir des dossiers compromettants. On n'en est pas encore arrivé là. Je parle d'une corporation souvent appréciée de l'extérieur mais méconnue de l'intérieur. La presse n'est pas à l'abri ni au-dessus de la critique, sinon on arrivera à une forme de mégalomanie. Le métier de journaliste requiert plus d'humilité et de sang-froid.»
S'agissant des traits très sévères de son personnage, Hamid Grine a renvoyé le lecteur vers le personnage de Bel Ami de Balzac qui, dit-il, est encore plus détestable. Revenant au style d'écriture, Madjid Bekhouche relèvera le côté fluide de l'écriture de Hamid Grine qui interpelle sur des questions d'éthique et de morale. Cette dernière se termine par une sanction. «Un roman qui construit un univers sur ce qui ne devrait pas être l'âme humaine dans ses traits les plus vils. Un personnage qui a mal agi et qui paye.» M.Bekouche parle d'«audace» concernant Hamid Grine en abordant un tel sujet et ce grâce à une «écriture simple et déliée.» Selon lui, le message que l'auteur de La Nuit du henné essaie de transmette à la corporation s'apparente à «une forme d'engagement» vis-à-vis de la société en se positionnant moralement et éthiquement par rapport au sujet. «Je n'ai jamais été un homme de pouvoir et je ne cours pas après l'argent. Il n'y a qu'ici que j'ai constaté cette inversion des valeurs. Ailleurs, un bon journaliste gagne bien sa vie. C'est normal. Ici, les gens cultivés sont pauvres...» Relevant les tristes conditions matérielles de travail du journaliste en Algérie, Hamid Grine fera remarquer: «Si on améliore les conditions de vie des journalistes, on aura une grande presse.» L'auteur de Cueille le jour avant la nuit soulignera ses intentions littéraires en faisant remarquer qu'il écrivait aux Algériens sans tricher ni pasticher aucun écrivain français. «Seul compte pour moi l'avis des lecteurs. J'ai écris ce livre sans faire de marketing. J'ai d'abord pensé aux conditions de vie des journalistes en écrivant ce livre. C'est un coup de coeur en pensant au journaliste de base. Ce dernier doit avoir un bon salaire, une maison décente et une voiture au moins.» Hamid Grine, revenant sur les déboires financiers de son producteur pour entamer la production du film d'après son livre La Nuit du henné, annoncera les intentions d'un autre producteur, Bachir Derraïs de vouloir produire sur grand écran Il ne fera pas long feu.
Hamid Grine évoquera son écriture dont d'aucuns lui ont suggéré de s'essayer au scénario eu égard à son style très imagé. «Le scénario est un autre métier. Je ne me sens pas la vocation d'écrire un scénario. On m'a proposé 50.000 euros pour écrire un livre sur le sport, j'ai refusé. L'écriture littéraire, contrairement à l'écriture journalistique, ne peut être impulsée. Le journalisme c'est la gestion factuelle.» Citant une anecdote, Hamid Grine se souvient de la lettre de Françoise Giroud, ancienne directrice de l'Express qui lui avait conseillé de continuer son métier de journaliste.
Revenant encore sur ses réelles motivations qui l'ont poussé à écrire le roman, Il ne fera pas long feu, Hamid Grine soulignera: «Ce livre est à lire au 2e ou au 3e degrés. Il y a des codes. Ce n'est pas une autobiographie. J'ai écris un roman pour deux raisons: premièrement car toute vérité n'est pas bonne à dire et deuxièmement pour éviter de toucher certaines susceptibilités. Les situations décrites dans le livre, je les ai vécues et c'est en combinant plusieurs traits que j'ai construit mon personnage. Jamais le personnage n'échappe à l'auteur. C'est faux de dire ça. Je me reconnaîs dans Hassoud, y compris dans sa femme...»


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