Alors que l'Algérie s'apprête à célébrer le trente-neuvième anniversaire de la nationalisation de ses hydrocarbures, la France risque de vivre dans les prochains jours une sévère pénurie de carburants. Un début de panique a commencé à envahir les automobilistes de l'Hexagone suite à l'annonce de la fermeture de la raffinerie de Dunkerque par le géant pétrolier français. Ce qui a entraîné une grève de l'ensemble des autres sites. Des queues interminables se sont formées devant les pompes d'essence pour constituer des stocks de carburants. Les vannes ont été fermées le 18 février après que les salariés de toutes les raffineries du Groupe en France aient voté une grève illimitée. «Nous coupons toute sortie de produits pétroliers. Au bout de cinq jours d'arrêt, il peut y avoir un début de pénurie d'essence dans les stations-service», a annoncé le coordonnateur, Charles Foulard de la CGT, syndicat majoritaire au sein du groupe. L'intersyndicale, qui devait rencontrer hier en début d'après-midi la direction du géant pétrolier dont les raffineries (Gonfreville-l'Orcher, Donges, Dunkerque, Grandpuits, La Mède, Feyzin) approvisionnent 54% des stations d'essence en France, a mis en garde contre un éventuel fiasco des discussions. «En cas d'échec des négociations, la pénurie de carburants sera à l'ordre du jour dès la semaine prochaine. Elle est de l'entière responsabilité du groupe Total», ont averti les syndicats. Christine Lagarde, ministre de l'Economie, tente de rassurer de son côté. «Il n'y a pas de risque de pénurie», avait-elle déclaré vendredi sur les ondes de France Info. Le président-directeur général de Total tentait, à seulement quelques heures de sa cruciale rencontre avec les représentants des travailleurs, de rassurer et de déblayer un terrain qui donne la nette impression d'être sérieusement miné. «Si nous devions arrêter cette activité, nous nous sommes engagés à maintenir le site en activité et à reclasser les salariés sans aucun licenciement», avait assuré Christophe de Margerie dans une déclaration au JDD, le Journal Du Dimanche. S'il a affirmé que les cinq autres raffineries n'étaient pas concernées par un quelconque projet de fermeture, l'avenir de celle des Flandres près de Dunkerque ne semble guère certain. Ce qui préoccupe au plus haut point le gouvernement français. «Il est hors de question de fermer la raffinerie près des Flandres (Dunkerque)...ni évidemment d'en fermer aucune autre en France», a prévenu le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi. Un conflit en perspective? On en saura un peu plus après la rencontre programmée cet après-midi entre le ministre français de l'Industrie et le P-DG de Total. Il faut faire remarquer, sur un autre plan, que les cours de l'or noir n'ont pas encore été affectés par le durcissement de la grève au niveau des raffineries du fleuron de l'industrie pétrolière française. Ce sont plutôt les tensions sur l'Iran qui risquent de provoquer une flambée des prix du brut. Des informations tendent à faire croire que les activités nucléaires iraniennes sont sur le point de permettre à Téhéran de se doter de l'arme nucléaire. Le contexte géopolitique est en ébullition. Le coup d'Etat militaire au Niger a permis au baril d'atteindre un pic: les opérateurs ayant cru un moment que l'événement avait lieu au Nigeria, premier producteur de brut en Afrique et 8e exportateur au niveau mondial. Les prix du pétrole ont cependant réagi positivement, grâce aux indicateurs économiques prometteurs annoncés aux Etats-Unis. «Il y a deux bons rapports économiques aux Etats-Unis. Voir l'économie continuer à croître suffit à donner de l'élan au marché et le porter aux niveaux actuels», fait remarquer l'analyste du fonds d'investissement spécialisé Round Harth Energy. L'indice des indicateurs économiques américains pour le semestre prochain est en progression pour le dixième mois consécutif. Résultat: les prix du pétrole ont franchi, jeudi, la barre des 79 dollars. Le baril de «Light Sweet Crude» a réalisé un gain de 1,73 dollar par rapport à la séance de mercredi clôturant à 79,06 dollars malgré une hausse des réserves de brut de l'ordre de 3,1 millions de barils aux Etats-Unis. Cet optimisme n'est pas retombé vendredi, porté par une baisse du billet vert, les prix du pétrole ont frôlé la barre des 80 dollars, terminant la semaine à 79,79 dollars à New York. Le marché pétrolier garde toutefois un oeil sur la grève déclenchée par les salariés des raffineries du groupe Total dans l'Hexagone. Elle pourrait paralyser la France dans les prochains jours et booster les cours de l'or noir si la rencontre d'hier entre syndicats et direction venait à être sanctionnée par un échec.