La commission électorale a rejeté un décompte de l'ensemble des votes au niveau national, mais a laissé la porte ouverte à des vérifications dans certains centres. Le Premier ministre irakien sortant, Nouri al-Maliki, engagé dans une lutte féroce pour le pouvoir avec son rival laïque Iyad Allawi, a demandé hier un nouveau décompte des bulletins de vote après les législatives du 7 mars. La commission électorale a rejeté un décompte de l'ensemble des votes au niveau national, mais a laissé la porte ouverte à des vérifications dans certains centres après le dépôt de plaintes par les partis politiques. La liste de M.Allawi a réagi en accusant le chef du gouvernement de «menaces» et de «pression» contre la commission électorale pour influencer les résultats au moment où elle est en tête, en nombre de voix. Dans un communiqué, M.Maliki a appelé «la haute commission électorale à répondre aux demandes des partis politiques de réaliser un nouveau décompte des voix manuellement». Soulignant qu'il était toujours «le chef des forces armées» et responsable de «la politique du pays», le Premier ministre a expliqué souhaiter un nouveau décompte «afin de préserver la stabilité politique, empêcher une dégradation de la situation sécuritaire et un retour à la violence». «Il y a des signes de manipulations dans le dépouillement qui ont provoqué des inquiétudes et un mécontentement de la part de l'opinion publique», a estimé un conseiller de M.Maliki, Ali al-Moussawi. «Le processus se déroulait bien jusqu'au niveau de 60% des bulletins dépouillés. Les chiffres ont augmenté de façon illogique et cela a poussé de nombreux blocs à demander au Premier ministre et au président de la République (Jalal Talabani) des décomptes manuels», a-t-il insisté. M.Talabani a demandé dans un communiqué que commence dès dimanche (hier) «un nouveau décompte manuel», sans préciser si celui-ci devait être national ou ciblé. Le président de la commission électorale irakienne, Faraj al-Haidari, a déclaré qu'un décompte de l'ensemble des bulletins de vote prendrait «trop de temps». «Nous avons fourni à toutes les entités politiques des CD avec les résultats des dépouillements dans les centres électoraux, après des vérifications en profondeur de notre part», a-t-il ajouté. «S'ils doutent et pensent qu'il y a une erreur, qu'ils nous avisent pour recompter dans ce centre précis mais pas dans tout l'Irak», a-t-il précisé. Le Premier ministre a reçu le soutien de dix gouverneurs membres de son parti. Après une réunion dans la ville sainte chiite de Najaf, ils ont souhaité «un nouveau décompte manuel, en présence d'observateurs de tous les partis politiques et sans l'usage des méthodes électroniques obscures qui ont insinué le doute» chez les électeurs. Mais ces demandes de décompte ont été condamnées par le Bloc irakien de M.Allawi. Elles «représentent des menaces claires contre la commission électorale dans le but de faire pression sur elle et changer les résultats en faveur de l'Alliance de l'Etat de droit (AED, de M.Maliki)», a dit Intissar Allawi, candidate proche de M.Allawi. Après avoir été devancés par le Bloc irakien, des candidats de l'AED ont dénoncé des manipulations commises, selon eux, par des responsables de la commission électorale, sans toutefois fournir de preuves. La commission et l'ONU ont rejeté ces accusations malgré un dépouillement qui traîne en longueur et qui a provoqué des accusations de fraudes dans la plupart des camps. Selon les résultats publiés samedi portant sur 92% des bulletins dépouillés, le Bloc irakien devance l'AED de 7928 voix. Au total, M.Allawi a recueilli 2.543.632 votes, contre 2.535.704 à M.Maliki. L'Alliance nationale irakienne (ANI), composée de partis religieux chiites, est en troisième position avec 1.915.654 votes. La commission électorale a affirmé que les résultats définitifs ne seraient pas connus avant plusieurs jours, se refusant à donner une date précise.