Le président du Haut Conseil islamique, Cheikh Bouamrane, rejette cette proposition dans le fond et dans la forme. Bouguerra Soltani a-t-il changé d'avis? Sa dernière déclaration sur l'abolition de la peine de mort donne à réfléchir. Le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP) s'est montré peu intransigeant sur cette question. Mardi soir, il a proposé, à partir de Mascara, «le recours si c'est nécessaire à un référendum pour que le citoyen donne son avis sur le principe de l'application de la peine capitale en Algérie». Lors d'un point de presse qu'il a animé en marge d'un meeting populaire avec ses militants, M.Bouguerra Soltani a déclaré qu'«il est essentiel de maintenir le principe de la peine de mort car relevant d' une législation coranique dans un Etat de religion islamique». Mais, M.Soltani dit une chose et son contraire. «S'il s'avère nécessaire et que des organisations et opinions divergent sur le principe de l'application de la peine capitale, il sera impératif d'organiser un référendum sur la question», a déclaré le successeur de feu Nahnah. Alors que le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a opposé un niet catégorique à l'abolition de la peine de mort, Soltani veut donner la parole à la société pour exprimer sa position. Tout en soutenant que cette question est indiscutable, le patron du MSP estime qu'il est possible de débattre des procédés d'application de la peine de mort et des mécanismes de moratoire pour une durée déterminée, en appelant les spécialistes à trouver «les formules de son gel et non pas son annulation comme le revendiquent certains». Sujet sensible s'il en est, l'ouverture d'un tel débat risque de provoquer de vives réactions. La première émane du président du Haut Conseil islamique (HCI), Cheikh Bouamrane, qui rejette la proposition dans le fond et dans la forme. Cheikh Bouamrane estime que «l'appel lancé par M.Solatani pour l'organisation d'un référendum est sans fondement». Se référant au Saint Coran, M.Bouamrane explique que tout est défini dans les versets coraniques. Pour lui, M.Soltani ne maîtrise pas la Charia et le droit. Le débat sur cette question se durcit. La classe politique nationale est d'ailleurs partagée dans ses positions. L'on assiste à deux courants diamétralement opposés. Alors qu'une partie, qui se réfère aux principes de la Charia, rejette entièrement son abolition, l'autre plaide pour sa suppression au regard des droits de l'homme. La secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, fait de cette cause son cheval de bataille. «Il y a ceux qui veulent faire sciemment l'amalgame entre l'Islam et la condamnation capitale», a indiqué Mme Hanoune en marge du rassemblement de l'Organisation des jeunes pour la révolution (OJR) de son parti, tenu samedi dernier. «La peine de mort n'a absolument rien à voir avec la charia et encore moins avec les musulmans. Pour preuve, certains Etats aux USA appliquent la peine de mort et pourtant ils ne sont pas de confession musulmane que je sache!», a-t-elle martelé. Un avis partagé par le parti de Saïd Sadi qui plaide également pour la suppression de la peine de mort. Le RND n'est pas contre. Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme, Me Farouk Ksentini, veut également en finir avec cette disposition qui nuit à l'image de la justice. Or, de l'autre côté, la résistance est très forte. Le président du Haut Conseil islamique, Cheikh Bouamrane, se pose en avant-gardiste. Il persiste et signe que son institution «ne pourra jamais cautionner l'abolition de la peine de mort», ajoutant que «dire oui, serait remettre en cause plusieurs versets du Saint Coran». Le secrétaire général de l'instance exécutive du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a refusé complètement son abolition. Faut-il obéir à la Charia ou aux principes des droits de l'homme? Telle est la vraie problématique à laquelle est confrontée l'Algérie de 2010. D'autant que le dernier rapport sur les droits de l'homme n'a pas été tendre avec notre pays. Même si l'Algérie a cette peine capitale observe un moratoire sur la peine de mort depuis 1993, il n'en demeure pas moins que cette peine capitale reste toujours un alibi pour les ONG pour nuire à Algérie. Selon le rapport Amnesty International de 2009, au chapitre «peine de mort et exécutions en 2008», l'Algérie s'est ainsi placée au 4e rang des pays qui condamnent le plus à mort, derrière la Chine (plus de 7000 condamnations), l'Iran (285) et le Pakistan (236).