Centré sur la question palestinienne, le Sommet arabe de Syrte donne l'impression d'une réunion sans réels projets et objectifs. C'est ballottés entre divergences et conflits internes que les leaders arabes se sont réunis hier pour leur 22e Sommet à Syrte. Ils avaient notamment à débattre la question palestinienne et ses derniers développements qui ne laissent de préoccuper le monde arabe. Malgré l'importance de l'ordre du jour de ce sommet arabe, ils n'étaient que douze chefs d'Etat ou de gouvernement à faire acte de présence à Syrte, parmi lesquels le Président Abdelaziz Bouteflika. La moitié des chefs d'Etat arabes étaient donc absents d'un sommet pourtant baptisé «Sommet d'appui à la résistance d'El Qods». Sommet auquel ont pourtant pris part, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, les Premiers ministres turc et italien, Recep Tayyip Erdogan et Silvio Berlusconi, le chef de la diplomatie espagnole, Miguel Angel Moratinos, le président de la Commission africaine, Jean Ping et le secrétaire général de l'OCI, le Pr Ekmeleddin Ihsanoglu, ainsi que plusieurs responsables internationaux et régionaux. Ce sommet est marqué d'avance par les différents «malentendus» qui existent entre les dirigeants arabes. Comme en témoigne d'ailleurs l'absence remarquée d'une dizaine de dirigeants arabes. L'ordre du jour de cette session comprend plusieurs points axés sur le renforcement de la solidarité et de l'action arabe commune pour faire face aux tentatives israéliennes de judaïsation d'El Qods. L'Algérie a été représentée, à ce sommet, par le président de la République Abdelaziz Bouteflika, entouré du ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci et Abdelkader Hadjar, représentant permanent de l'Algérie auprès de la Ligue arabe. Dès son arrivée vendredi à Syrte, M.Bouteflika a eu plusieurs entretiens avec ses homologues arabes. Ainsi, le Président Bouteflika a eu, à cette occasion, des discussions avec le Guide de la Révolution libyenne, Mouamar El Gueddafi, le roi de Jordanie Abdallah II, le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, l'émir du Koweït, Cheikh Sabah Al Ahmed El Jabber Al Sabah, et le président du Soudan, Omar El Bechir. Dans son discours prononcé à l'ouverture des travaux, le colonel El Gueddafi a déclaré que «le citoyen arabe attend des dirigeants arabes des actes et non pas des paroles» et que «le sommet ne prendra aucune décision qui sera rejetée par ce citoyen». Les dirigeants arabes, a ajouté le Guide de la Révolution libyenne, «font face, dans ce sens (...) à des défis inédits. Nous essayons d'oeuvrer conformément aux aspirations arabes et nous sommes obligés d'avancer.» L'émir de l'Etat du Qatar, Cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, président sortant du Sommet arabe, a reconnu que «l'action arabe commune est confrontée à une crise arabe aiguë qu'on ne peut ignorer», a-t-il indiqué. Et de souligner que les réunions de la Ligue arabe ont été suspendues pour cause de résultats inadéquats. Pour sa part, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a axé son propos sur la situation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est occupées, affirmant qu'il est exclu de négocier avec Israël sans un arrêt total de la colonisation et l'annulation de la construction des 1600 logements à Jérusalem-Est occupée. «Nous ne pouvons pas tenir des négociations indirectes tant qu'Israël n'arrête pas totalement ses activités de colonisation à Jérusalem-Est et ne mette pas fin à sa politique du fait accompli», a affirmé M.Abbas devant les dirigeants arabes. Alors que ces derniers écartent tout soutien à la reprise des négociations israélo-palestiniennes sans un gel de la colonisation, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon les a appelés à soutenir ces pourparlers, tout en estimant les projets d'Israël «illégaux». Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a estimé pour sa part, que considérer Jérusalem comme la capitale «indivisible» de l'Etat hébreu, comme le font les Israéliens, est de la «folie». «Jérusalem est la prunelle des yeux du monde musulman (...) Si Jérusalem brûle, cela signifie que la Palestine brûle. Et si la Palestine brûle, cela veut dire que le Proche-Orient brûle», a-t-il mis en garde devant le sommet. Entre les paroles des dirigeants arabes et les actions des dirigeants israéliens, ce sont les Palestiniens qui paient quotidiennement le prix de l'agression israélienne. Jamais une réunion des dirigeants arabes n'a été soutenue par des actions concrètes. Les dirigeants arabes se suffisent de «condamnation» et de «dénonciation» sans effet. Que peuvent attendre, ainsi, les Palestiniens, des leaders qui ont montré leur incapacité à dépasser même les crises interarabes? La réunion de Syrte se présente, d'ores et déjà, comme une rencontre sans réels projets et sans objectifs, permettant cependant aux «leaders» d'échanger la bise et d'avoir quelques entretiens en tête à tête.