Les habitants de Tizi Ouzou ont du mal à s'adapter aux nouvelles conditions d'obtention du passeport. Déjà coincés dans un inextricable labyrinthe bureaucratique, les citoyens ont accueilli, avec scepticisme, les nouvelles procédures pour l'établissement du passeport et de la carte nationale d'identité. Nous nous sommes déplacés dans quelques sièges de daïra et commune de la wilaya de Tizi Ouzou tentant de sonder le climat général. Les personnes interrogées semblent étonnées par plusieurs points relatifs aux procédures requises. A Makouda, un jeune à la trentaine réagit en sifflant en jetant un coup d'oeil sur le bout de papier où sont énumérés les documents requis. «C'est tellement long que je n'ose pas commencer l'établissement de tous ces papiers», affirme-t-il. «Ça va prendre plus d'une semaine. Pour un papier, il faut aller à Tigzirt. Pour un autre, il faut aller à Tizi Ouzou. Il va falloir faire le tour de la wilaya pour réunir tous ces documents», poursuit-il, déjà fatigué avant de se lancer dans l'aventure. A Tizi Ouzou où le lancement a été effectué avant-hier, les avis des citoyens sont unanimes. «C'est l'enfer, déjà bien avant, l'établissement d'un acte de naissance à la mairie de la ville relève du défi. Qu'est-ce qui nous attend mon Dieu!», se lamentait un homme probablement un agent de l'état civil. «Puis-je vous éclairer?» Nous l'avons volontiers invité à notre conversation. «Si l'établissement d'un acte de naissance à la mairie de Tizi Ouzou est très lent, ce n'est pas la faute aux agents. Essayez plutôt de voir pourquoi les naissances de toutes les communes sont inscrites dans cette antenne», explique-t-il. En effet, après un bref aperçu de la situation, nous avons compris que les lenteurs s'expliquent d'abord par le nombre d'habitants important et l'existence d'une seul antenne de l'état civil. Nous avons aussi su que la clinique Sbihi, qui reçoit toutes les femmes pour accouchement, inscrit les naissances à Tizi Ouzou- ville. Formulaire ou intrusion dans la vie privée? Cependant, pour revenir aux sujets des passeports et les cartes nationales d'identité biométriques, les gens n'hésitaient pas à afficher leur appréhension. «Regardez ce formulaire, à quoi sert-il de déclarer les amis d'enfance?», s'interrogeait un autre jeune. En fait, les personnes interrogées ne croyaient guère aux facilités que va apporter cette procédures. En effet, lors du lancement de l'opération, les responsables affirmaient qu'une trentaine de dossiers seraient quotidiennement traités dans chaque daïra. Dans le but de simplifier le travail, les citoyens seront reçus sur rendez-vous pris au préalable auprès de l'autorité chargée du dossier. Sauf que ces explications ne semblent pas convaincre les citoyens. «Moi, je préfère qu'on m'explique l'opportunité des questions relatives à mes amis d'école ou mes camarade du Service national», se demandait un homme accosté devant la mairie de Tigzirt «Que voulez-vous? un pays où l'on demande chaque jour le certificat de nationalité. Pourquoi je traîne toujours cette carte d'identité alors?», s'interroge un autre visiblement irrité quant à la difficulté d'établir tous les documents relatifs aux parents. Qu'est-ce qu'un répondant? La question est sur toutes les lèvres. Rencontrés à la mairie de Ouaguenoun, les vieux et même les jeunes trouvent des difficultés à comprendre le sens de toutes les procédures. Les tentatives des agents d'orienter le mieux possible restent vaines car, ce sont celles-ci qui ne sont pas claires aux yeux des citoyens. «Je ne sais vraiment pas pourquoi, un autre doit témoigner que c'est vraiment moi qui suis sur la photo?!» Ce sont les mots d'un citoyen qui ne comprend pas l'utilité d'avoir un répondant pour convaincre que la photo est bien à lui. Un homme âgé attendant devant le guichet à Ouaguenoun, se demandait pourquoi, à son âge, il lui faut un tuteur. «Pourquoi?...Dois-je avoir un témoin pour prouver que c'est bien moi?», nous questionne-t-il. Notons enfin, qu'à Tizi Ouzou, les conversations sont rares à propos des exigences d'enlever le voile pour les femmes et la barbe pour les hommes. «C'est du n'importe quoi ce débat, car porter le voile avant la photo et l'enlever pour les besoins d'une carte d'identité ne signifie rien si la femme se remet à le porter. On ne la reconnaîtrait pas pendant les contrôles, du moment qu'elle est voilée. Je crois que ça n'a pas de sens et cela ne sert qu'à alimenter les débats stériles et compliquer la vie aux gens», nous dira une jeune qui pense que le débat en question ne mène à rien.