L'opposition soudanaise a crié victoire à la publication ce week-end des rapports de la mission de l'Union européenne et de la Fondation Carter, les deux principaux observateurs internationaux. Les critiques des observateurs internationaux à l'égard des élections soudanaises apportent de l'eau au moulin de l'opposition mais nuisent à la crédibilité des ex-rebelles du Sud-Soudan, où a été recensé le plus d'irrégularités, à l'approche du référendum d'indépendance. L'opposition soudanaise a crié victoire à la publication ce week-end des rapports de la mission de l'Union européenne et de la Fondation Carter, les deux principaux observateurs internationaux, pour qui les premières élections multipartites en 24 ans ne répondent pas «aux normes internationales». Incapable d'unifier son programme ou sa stratégie, l'opposition s'est présentée en ordre dispersé au scrutin -boycotté par certains partis- même si elle partageait la conviction que le scrutin était truqué par le parti au pouvoir, le NCP du président Omar El Bechir. «Le vote et le décompte des voix sont frauduleux. Nous allons porter plainte devant la justice, et si le juge ne nous donne pas raison, nous allons peut-être emprunter d'autres alternatives que les urnes», a dit l'opposant islamiste Hassan al-Tourabi, dont le parti avait choisi de participer aux élections malgré de sérieux doutes sur leur crédibilité. «Qu'est-ce qu'ils planifient? Ils l'ont déjà indiqué, et nous le savons bien: ils ne vont pas reconnaître le résultat des élections, ils vont manifester dans la rue afin de tenter de changer le régime (...) par un conflit ou des émeutes», a déclaré cette semaine à la presse Nafie Ali Nafie, assistant influent du président Bechir. «Ils évoquent les exemples du Zimbabwe, du Kenya, du Nigeria (...) comme s'ils voulaient convaincre l'opinion publique que cela était possible», mais ils vont découvrir que c'est un «mirage», a-t-il ajouté. «L'opposition parle d'organiser des rassemblements politiques, des manifestations, mais tout n'est pas pour maintenant», estime Mubarak al-Fadil, un des ténors de l'opposition, ajoutant qu'elle devait se préparer. «Si elle tient des manifestations maintenant, l'opposition risque de provoquer une révolution de palais», estime un analyste soudanais sous le couvert de l'anonymat. En appelant à manifester, l'opposition pourrait provoquer un changement au sein du régime plutôt qu'un changement de régime. Si les observateurs internationaux ont critiqué le processus électoral au Nord-Soudan, ils ont aussi épinglé les ex-rebelles au pouvoir dans la région semi-autonome du Sud-Soudan qui doit tenir en janvier 2011 un référendum sur son indépendance. «Il y a eu plus d'irrégularités au Sud-Soudan», a résumé Véronique De Keyser, chef de la mission d'observation de l'Union européenne, soulignant la «faiblesse de l'organisation» du scrutin dans cette vaste région aux infrastructures balbutiantes. Et «il y a eu beaucoup de cas d'intimidation, de menaces ou de recours à la force» au Sud-Soudan, a renchéri la Fondation Carter, notant l'importance de tirer leçon des élections afin que ces mêmes «irrégularités», «techniques et politiques», ne se reproduisent pas lors d'un référendum d'indépendance. Ces critiques sur la conduite des élections au Sud-Soudan peuvent-elles nuire à la crédibilité du référendum à venir? «Il n'y a pas de lien entre les élections et le référendum», estime Yasser Arman, ex-candidat du Splm à la présidentielle soudanaise. «Idéalement, des leçons devront être tirées afin d'améliorer l'exercice référendaire du point de vue de l'organisation», explique Zach Vertin, spécialiste du Sud-Soudan à International Crisis Group (ICG).