Le caractère exprime la langue mais il est loin d'être la langue. Le Dr Abderrazak Dourari, directeur du Centre national pédagogique et linguistique pour l'enseignement de tamazight, et contrairement à ses habitudes, n'a plaidé pour aucun caractère de transcription de la langue amazighe. Jusque-là, Abderrazek Dourari a été un fervent défenseur des caractères arabes, concernant le choix des caractères pour l'enseignement de la langue amazighe. Sa position sur ce sujet sensible n'a pas été du goût de la majorité des universitaires et enseignants de la langue amazighe. Dourari, qui intervenait hier, dans le cadre de la Semaine de l'amazighité à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, a affirmé que le choix des caractères de transcription est accessoire, arguant que le caractère exprime la langue mais il n'est pas la langue. Pour lui, ce qui est plus important, c'est de produire dans cette langue. M.Dourari a estimé que ceux qui ont remis au goût du jour le débat sur le choix des caractères de transcription de tamazight ont voulu semer la zizanie et créer de faux problèmes car, ayant constaté que sur le plan institutionnel, le problème de tamazight est réglé. Toujours sur le même sujet, le conférencier, en poste depuis 2005, a rappelé que, lors de la dernière campagne électorale pour la présidentielle, les candidats avaient utilisé les caractères latins pour transcrire tamazight dans l'ensemble des wilayas de Kabylie. Ce qui prouve, à ses yeux, que c'est le caractère latin, qui pouvait transmettre le mieux le message des candidats à la présidentielle. Dourari a expliqué que désormais, les problèmes inhérents à l'amazighité, qui s'exprimaient dans la rue devraient s'exprimer dans les institutions spécialisées dans la recherche. Toutefois, il a déploré un certains nombre de problèmes qui empêchent son centre d'évoluer plus rapidement, notamment, le fait qu'il ne soit pas rattaché au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Le fait que le centre dépende du ministère de l'Education nationale constitue un handicap car il lui est difficile d'engager des universitaires ayant des titres de doctorat et de magister en son sein. Depuis quelque temps, le centre en question a chargé des universitaires chercheurs de réaliser deux études. La première est inhérente aux profils des enseignants de tamazight en exercice. «Il est important de savoir entre les mains de qui le sort de tamazight est mis», a indiqué le conférencier. Les résultats de l'étude ont montré que 60% des enseignants de tamazight sont détenteurs d'une licence en culture et langue amazighes. Ce qui constitue pour lui un point positif. Dourari a suscité la colère de Abdellah Arkàoub, inspecteur de tamazight, en critiquant certains enseignants ayant fait partie de la première promotion ayant lancé tamazight à l'école en 2005. Mais Dourari rectifiera vite le tir, en disant que son objectif n'était pas de critiquer ces enseignants mais juste d'établir un constat. D'ailleurs, a-t-il tempéré, les enseignants de tamazight et l'enseignement de tamazight ont connu d'énormes progrès depuis le lancement de celui-ci il y a quinze ans. La deuxième étude réalisée par les chercheurs du centre de Dourari a trait aux manuels scolaires. L'objectif de cette étude consiste à relever les insuffisances contenues dans ces ouvrages. Dourari a indiqué que seule la création d'une académie de tamazight permettra d'enclencher des recherches scientifiques sérieuses dans le domaine. Une académie, a indiqué le conférencier, est une institution dotée de gros budgets et possédant une autorité morale et scientifique supérieure. Cette académie devra être rattachée directement à la présidence de la République. Dourari constate qu'en l'absence d'une académie, il ne sera pas possible de faire appel à des chercheurs étrangers. En Algérie, les chercheurs spécialisés en linguistique ne foisonnent pas, d'après l'orateur.