Le juge Garzon a reçu le soutien remarqué de l'ex-chef de gouvernement socialiste Felipe Gonzalez que le magistrat avait pourtant mis gravement en cause avec son enquête dans les années 90 sur les Gal. Des manifestations de soutien au juge Garzon, accusé d'avoir voulu enquêter sur les crimes amnistiés du franquisme, étaient organisées hier dans plusieurs villes d'Espagne alors que le célèbre magistrat a contre-attaqué en «récusant» le juge qui le met en cause. Des manifestations ont rassemblé plusieurs centaines de personnes hier à Jaen (sud), Valence (est) et Las Palmas, aux Canaries, sous les slogans «contre l'impunité du franquisme» et «contre la criminalisation de Garzon». Il était prévu hier des mobilisations dans un total d'une vingtaine de villes en Espagne ainsi qu'à l'étranger, à Paris, Londres, Lisbonne, Buenos Aires et Mexico, selon l'édition en ligne du quotidien El Pais. La plus importante devait se tenir à Madrid et se conclure par la lecture d'un manifeste par le cinéaste Pedro Almodovar, l'écrivaine Almudena Grandes et le poète communiste Marcos Ana, selon les organisateurs. Ces rassemblements ont été organisés par «un groupe de citoyens qui luttent pour la justice», qui se disent étrangers à la politique et se sont beaucoup servis des réseaux sociaux comme Facebook pour mobiliser. Un des organisateurs, Toni Garcia a souligné hier la nécessité d'éliminer la loi d'amnistie de 1977, disposition «injuste et ridicule» qui «empêche d'enquêter sur des crimes contre l'humanité» de la Guerre civile (1936-39) et de la dictature franquiste (1939-1975). Le juge Garzon a reçu le soutien remarqué de l'ex-chef de gouvernement socialiste Felipe Gonzalez que le magistrat avait pourtant mis gravement en cause avec son enquête dans les années 90 sur les Gal, organisation parapolicière responsable de l'assassinat d'indépendantistes basques. M.Gonzalez a qualifié vendredi «d'injuste et inexplicable» le futur procès contre Garzon, ajoutant: «vous savez que je n'ai pas une relation privilégiée avec M.Garzon et peut-être que cela donne plus de poids à mes mots». A Madrid, une «contre-manifestation» devait se dérouler hier en fin d'après-midi à l'appel du parti d'extrême droite «La Phalange» pour «défendre l'honneur» de ceux qui ont «souffert la répression et l'assassinat par ceux de la deuxième République» espagnole (1931-36). Ces mobilisations interviennent alors que le juge Garzon a décidé de contre-attaquer, mettant directement en cause le juge du Tribunal suprême Luciano Varela qui veut le juger. Garzon a demandé la récusation du juge Varela, estimant que ce dernier a manifesté son «intérêt indirect» et sa «partialité» dans cette affaire, selon l'acte officiel de demande de récusation. Le juge Garzon est poursuivi par le Tribunal suprême pour avoir voulu, pour la première fois en Espagne, enquêter sur les disparus de la Guerre civile et de la répression franquiste, en enfreignant, «sciemment» selon l'accusation, la loi d'amnistie générale votée en 1977, deux ans après la mort de Franco. Il risque une peine de 20 ans d'inhabilitation professionnelle, mais il a fait appel de son renvoi pour jugement. Le parquet du Tribunal suprême s'oppose à ce qu'il soit jugé et estime qu'en l'absence d'accusation publique, les parties civiles ne sont pas fondées à déclencher, toutes seules, un procès. La mise en accusation du juge Garzon suscite une vive controverse en Espagne, où elle choque profondément les milieux de gauche et les associations de victimes du franquisme. La droite estime quant à elle que la justice doit suivre son cours en toute indépendance. Le juge Garzon a reçu le soutien de nombreux juristes dans le monde, qui estiment que les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles et que la loi d'amnistie espagnole n'est pas conforme au droit international.