Qui dirigera la Russie en 2012, à l'issue de la prochaine présidentielle? Les cartes paraissent plus brouillées que jamais, Dmitri Medvedev ayant de manière inopinée fait savoir qu'il envisage de se représenter, laissant entière la question du rôle de Vladimir Poutine. Le président russe et son ancien mentor devenu voilà deux ans son Premier ministre, entretiennent allègrement l'ambiguïté sur leurs projets respectifs pour la prochaine élection présidentielle, prévue en mars 2012. M.Medvedev, qui s'apprête à fêter -le 7 mai prochain - le deuxième anniversaire de son arrivée à la magistrature suprême, n'a jamais réussi à faire taire les spéculations affirmant que M.Poutine récupérerait sans complexe en 2012 la présidence, qu'il a occupée de 2000 à 2008. Mais M.Medvedev a encore compliqué la donne en déclarant ce week-end au journal norvégien Aftenposten: «Je n'exclus absolument rien, y compris ma participation à cette élection, si cela est nécessaire pour le pays». «C'est la première fois que M.Medvedev parle de ses projets présidentiels sans évoquer d'accord avec Vladimir Poutine», souligne hier le quotidien économique Vedomosti. Or ce dernier, ancien espion du KGB métamorphosé en chef tout-puissant de la Russie post-soviétique au cours de ses deux mandats successifs, avait indiqué en septembre dernier que le président et lui-même se mettraient d'accord avant de décider. La Constitution russe interdisait à M.Poutine de se représenter en 2008, et il avait par conséquent désigné l'un de ses proches, originaire comme lui de Saint-Pétersbourg, comme héritier. Mais rien ne l'empêche désormais de briguer un troisième mandat en 2012. «La question va être discutée entre eux deux, mais c'est Poutine qui prendra la décision. Deux ans après, il est toujours le leader dans le tandem», estime Maria Lipman, analyste du Centre Carnegie à Moscou. Les dissonances entre les deux hommes sont rarissimes, tandis que leurs apparitions publiques donnent l'impression d'être soigneusement chorégraphiées en haut lieu. Le président Medvedev sur lequel reposaient initialement beaucoup d'espoirs de libéralisation du régime, s'efforce toutefois de mettre l'accent sur la nécessité de moderniser l'économie et de réformer les services de sécurité. Ses détracteurs jugent cependant qu'il peine à faire avancer la cause démocratique en Russie. Un rapport analytique publié hier par le centre de recherche russe Agence de communications politiques et économiques compare le processus de sélection des élites politiques russes aux primaires américaines. Selon les trois auteurs de l'étude, il semble «impossible dans un avenir prévisible» que M.Poutine disparaisse de la scène politique en 2012. Ils ont toutefois sélectionné trois scénarios principaux. Le premier table sur un statu quo, c'est-à-dire une reconduction du tandem sans changement de fonctions. «Le principal argument en sa faveur est le fort degré d'inertie du processus politique. Cela signifie que de toutes les options, c'est la moins conflictuelle qui serait retenue», estime le rapport. Dans le deuxième, M.Poutine reprend les rênes du Kremlin. Cette thèse s'appuie sur le fait qu'il bénéficie «du plus grand niveau de confiance auprès de la population» et parce que la popularité de M.Medvedev découle largement de celle de son Premier ministre. Enfin, la troisième hypothèse se base sur l'apparition d'un troisième homme, «Monsieur X» qui deviendrait chef de l'Etat.