La tenue du Salon du livre amazigh, organisé par le Haut Commissariat à l'amazighité, à Bouira à partir du 17 du mois en cours est une occasion pour faire une halte et observer où en est le livre écrit en langue amazighe. Désormais, ce dernier est une réalité incontestable. Quinze ans après l'introduction de la langue amazighe dans le système éducatif et huit après sa constitutionnalisation comme langue nationale, tamazight possède une bibliographie respectable et qui permet d'espérer. Des éditeurs vont jusqu'à nous confier que le créneau du livre amazigh est porteur. Par exemple, tous les livres ayant pour contenu les anciens poèmes kabyles ou les contes, proverbes sont également très demandés par le lectorat de même que les lexiques. Le roman écrit en tamazight possède aussi une part respectable sur le marché du livre. Parmi les romans qui marchent très bien dans les librairies, on pourrait citer ceux de Amar Mezdad. Mais d'autres livres encore se vendent assez bien à l'instar de la traduction en tamazight du livre du moudjahid Chérif Ould El Hocine, Gul Umenugh traduit et publié par les éditions «Le Savoir». Cette même maison d'édition a publié des ouvrages en tamazight qui ont battu tous les records en matière de vente comme les ouvrages de Larab Mohand Ouramdane sur Si Mohand U M'hand et le poète El Hadj Arezki Ouhaouache. Le livre écrit par Mohand Zine Arab sur Si Mohand U M'hand a aussi trouvé un bon écho chez les lecteurs aussi bien que Awal swawal de Hocine Toumi. Les éditions «Le Savoir», créées en 2004 ont publié pas moins de vingt livres écrits en tamazight, soit plus de 50% de leur production. C'est le cas aussi des éditions «Tira» de Béjaïa, qui ont à leur actif 16 livres, édités en tamazight. D'autres éditeurs s'intéressent de plus en plus au livre amazigh, comme «l'Odyssée» et «El Amel» qui en comptent des dizaines. Sans oublier les autres maisons d'édition comme «Baghdadi», «Casbah Editions» et tant d'autres lesquelles ont toutes apporté leur contribution à la promotion du livre amazigh. Le Haut Commissariat à l'amazighité, bien que ce ne soit pas sa vocation principale et ayant compris l'enjeu déterminant de l'écrit, a publié depuis sa création, 180 livres en tamazight. Il est actuellement impossible de donner le nombre exact de livres publiés dans la deuxième langue nationale de l'Algérie mais une chose est indéniable, le processus est enclenché et le livre amazigh est incontournable. Alors qu'il n'y a pas longtemps, le nombre de livres publiés en tamazight se comptait sur les doigts d'une seule main, aujourd'hui, la situation est vraiment tout autre. Ainsi, en parcourant la bibliographie amazighe, le lecteur peut découvrir, avec plaisir, des ouvrages variés comme les romans de Amar Mezdad: Id d wass, Tagrest urghu et Ass-nni. On peut aussi citer Ccna n yefzaz de Laïfa Aït Boudaoud, Tighersi de Mohand Aït Ighil, Lwali n wedrar de Belaïd Ath Ali, Asfel et Faffa de Rachid Alliche, Timlilit n tghermiwin de Djamel Benaouf, Aechiw n tmes de Lynda Koudache, Yugar icherig tafawets de Ahmed Nekkar, Tafrara et Ighil d wefru de Salem Zenia, etc. La liste est encore longue. Plusieurs ouvrages et des classiques ont été aussi traduits en tamazight comme Le Fils du pauvre de Mouloud Feraoun traduit par Moussa Ould Taleb, Le Prophète de Jibran Khalil Jibran, traduit par Farid Abache, Rummana de Tahar Ouattar, Le Petit Prince de Antoine de Saint-Exupéry... Des extraits d'autres romans ont été traduits en tamazight comme ceux de Mouloud Mammeri et Tahar Djaout. Les extraits en question ont été publiés dans la revue «Izen Amazigh» de la Fédération des associations amazighes. D'autres manuscrits ont été édités dans des revues qui paraissent en Europe comme le roman de Fatiha Merabti, publié dans la revue «Tiziri» de l'association culturelle des Berbères de Bruxelles. Le livre amazigh est la base du développement et de la promotion de la langue amazighe. Sans lui, tous les efforts en cours pour la réhabilitation de l'amazighité resteront vains. Sans le livre, tamazight retombera dans le même piège que celui du passé. L'oralité a failli être fatale à cette langue millénaire. Les activités artistiques et folkloriques ne durent que le temps de leur tenue alors que le livre est éternel. Cet enjeu semble avoir été saisi par une bonne partie de ceux qui ont la charge du dossier amazigh. C'est pourquoi, aujourd'hui, on parle de plus en plus de la nécessité de mettre le paquet sur l'édition du livre amazigh.