Des milliers de Togolais ont défilé hier à Lomé dans deux manifestations distinctes, l'une pour dénoncer un accord entre l'opposant Olympio et le pouvoir, l'autre pour saluer cette nouveauté. En milieu de matinée d'hier, plusieurs milliers de personnes ont dans un premier temps entamé une marche de soutien à la «politique d'ouverture» du président Faure Gnassingbé. «C'est une manifestation organisée par les forces vives de la nation pour soutenir la politique de réconciliation, d'apaisement social et d'ouverture» du chef de l'Etat, a expliqué Solitoki Esso, secrétaire général du Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir). Suite à un accord signé mercredi avec le principal opposant togolais, Gilchrist Olympio, qui dirige l'Union des forces pour le changement (UFC), un décret présidentiel a annoncé vendredi la composition d'un nouveau gouvernement comprenant sept ministres issus de l'UFC. Il s'agit d'une première depuis la création en 1992 de ce parti, qui a notamment obtenu le portefeuille des Affaires étrangères. L'UFC est officiellement arrivée en deuxième position lors de la présidentielle du 4 mars qui a vu la réélection de Faure Gnassingbé. «Je suis sorti pour soutenir mon président, pour tous les efforts consentis pour que l'UFC puisse entrer au gouvernement. C'est un homme très ouvert, lui seul pourra réconcilier ce pays», a estimé un manifestant. Des cadres du RPT et des nouveaux ministres battaient le pavé aux côtés de nombreux jeunes portant des tee-shirts aux inscriptions «Faure Gnassingbé pour le Togo uni et prospère» et «Faure Gnassingbé président de tous les Togolais». L'accord du 26 mai a été décrit comme «historique», M.Olympio s'étant opposé pendant des décennies au général Gnassingbé Eyadéma, qui dirigea le pays d'une main de fer de 1967 à sa mort en 2005, puis à son fils, l'actuel président. Certains ont salué le courage de M.Olympio, dont le père, Sylvanus Olympio, premier président du Togo indépendant, fut assassiné en 1963 lors d'un coup d'Etat auquel prit part le général Eyadéma. Mais la pilule n'est pas passée à l'UFC qui est désormais clairement divisée. Estimant ne pas avoir été consulté par M.Olympio sur cet accord, le bureau national du parti a suspendu son dirigeant vendredi, ainsi que les 7 ministres. Partis en fin de matinée du quartier populaire Bè, des milliers de sympathisants de l'UFC, emmenés par leur candidat à la présidentielle, Jean-Pierre Fabre, brandissaient des pancartes «A bas les traîtres» et «Gilchrist Olympio le killer». M.Fabre rejette la victoire de M.Gnassingbé à la présidentielle qu'il estime avoir remportée. «Le gouvernement formé hier est une coquille vide (...) il ne sert à rien de débaucher notre président national. Sans Gilchrist, la lutte continue», a assuré une partisane de l'UFC. Gilchrist (Olympio) a reçu la sanction qu'il mérite parce qu'il a trahi notre parti. M.Olympio ne s'est pas exprimé après l'annonce de sa suspension. La marche de l'UFC, qui a manifesté quasiment tous les samedi contre la réélection de Faure Gnassingbé depuis le scrutin de mars, devait s'achever par un meeting sur la plage de Lomé. Les deux manifestations ne sont pas rencontrées, leurs trajectoires étant distinctes.