En cent jours, la junte militaire aux commandes au Niger a tenu sa promesse d'installer une transition en vue des élections, s'attirant un soutien international, mais à l'intérieur du pays des doutes commencent à se faire jour sur ses choix et sa pratique du pouvoir. Le 18 février, dans un pays habitué aux coups d'Etat, le président Mamadou Tandja, au pouvoir depuis dix ans, était renversé par un putsch. Prenait fin la grave crise née de sa volonté de se maintenir malgré la fin de son mandat légal. Très vite, le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (Csrd, junte) promet de rendre le pouvoir aux civils à l'issue d'élections, d'«assainir la situation politique» et de «réconcilier les Nigériens». En moins de quatre mois, le cadre de la transition a été posé. Elle doit ainsi s'achever par des élections générales avant le premier anniversaire du coup d'Etat. Un nouveau code électoral a été promulgué cette semaine par le chef de la junte, le général Salou Djibo. Des institutions de transition ont aussi été mises en place, en particulier un Conseil consultatif. Chargé de représenter les courants et couches sociales du Niger, il devra notamment donner son avis sur le projet de Constitution en cours d'élaboration. Quant à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), dont le chef vient d'être désigné, elle doit être installée en juin. A elle de proposer les dates du référendum constitutionnel et des différents scrutins. «C'est plutôt bien parti. Tout se met en place sur le plan institutionnel», estime une source diplomatique occidentale. Le CSRD vient d'ailleurs de recueillir un premier fruit de ses efforts. Ces derniers jours, la reprise par la Banque mondiale de ses décaissements suspendus en 2009 et l'annonce par l'Union européenne d'une possible reprise «graduelle» de sa coopération, «en fonction des progrès», ont traduit un soutien international au processus en cours. Naguère «mis à l'index», le Niger réintègre «progressivement la communauté internationale», se réjouit le porte-parole du gouvernement, Laouali Dan Dah. A l'intérieur, une relative bienveillance a longtemps dominé à l'égard du nouveau régime, crédité pour son action face à la grave crise alimentaire qui frappe encore le pays et pour la «décrispation» politique à l'ordre du jour, selon l'expression du syndicaliste Issoufou Sidibé. Le sort de Mamadou Tandja, toujours détenu, ne mobilise pas les foules, et les inquiétudes nées de l'arrestation d'une quinzaine de ses proches pour de présumées «activités subversives» se sont rapidement estompées avec leur libération en avril. Cependant, ce quasi-consensus commence à se fissurer: de premiers doutes apparaissent et les critiques se font plus dures envers la junte. Les chamboulements au sein de l'administration, où des centaines de nominations sont intervenues, suscitent de fortes contestations. Figure de la société civile, Mamane Hamissou dénonce une «gestion opaque» favorisant «parents, amis et alliés» du pouvoir. Le nouveau code électoral cristallise aussi des mécontentements, spécialement l'obligation faite aux candidats aux législatives d'être titulaires du baccalauréat.