Le Sommet de Gleneagles (2005) avait promis d'augmenter l'aide publique au développement destinée à l'Afrique de 25 milliards de dollars par an à l'horizon 2010. Selon l'Ocde, cette augmentation n'atteindra cette année que 7,6 milliards de dollars. «L'Afrique aurait pu progresser encore plus vite dans certains domaines si elle avait reçu tout l'appui qu'elle attendait et qui lui avait été promis.» Le constat est du Président Abdelaziz Bouteflika qui s'adressait jeudi, aux huit plus grandes puissances économiques du monde dans un discours-bilan sur la mise en oeuvre des engagements du G8 et de l'Afrique, à l'occasion du sommet du G8 qui se tient à Muskoka. Mais avant d'exposer les insuffisances, le président algérien a plaidé la cause des Africains et de l'Afrique qui est aujourd'hui, en mesure de présenter un bilan très honorable des résultats qu'elle a obtenus dans les différents domaines prioritaires. Il mettra en exergue quelques exemples «parmi les plus significatifs». En matière de paix et sécurité, l'Afrique s'est dotée d'une architecture de paix et sécurité couvrant les aspects prévention et gestion des conflits et des crises et le maintien de la paix. «La création de la Force africaine en attente progresse de manière satisfaisante.» C'est de plus en plus l'Afrique qui exerce le leadership dans la solution des crises sur le continent, les partenaires extra-africains étant seulement appelés à soutenir les efforts qui restent proprement africains. Dans le domaine de la gouvernance, «la majorité des gouvernements en Afrique sont issus d'élections pluralistes et transparentes». Le Président a réitéré le rejet par l'Union africaine de l'accès au pouvoir par des voies non constitutionnelles. En outre, le Mécanisme africain d'évaluation par les pairs «est un Mécanisme unique au monde» pour promouvoir la culture de la bonne gouvernance. «Il est indéniable que l'ensemble de ces efforts dénotent le sérieux de l'Afrique à faire face aux défis de la paix et de la sécurité, et de la bonne gouvernance.» Dans le domaine économique, les experts qualifient de plus en plus l'Afrique comme un nouvel espace pour l'investissement et la croissance de l'économie mondiale. Par ailleurs, les pays africains ont mobilisé des moyens importants pour faire face aux défis de la santé et de l'éducation. S'agissant de l'intégration régionale et continentale, d'importantes institutions ont vu le jour: le Parlement panafricain, la Banque africaine d'investissement, l'Université panafricaine. En outre, de nombreux projets d'infrastructures à vocation d'intégration ont été identifiés dont certains en cours de réalisation, voire en voie d'achèvement comme c'est le cas pour la route transsaharienne. Au président de la République d'appeler les pays membres du G8 à respecter leurs engagements vis-à-vis de l'Afrique pour appuyer ce processus. «Ce qui est clair, c'est que l'on prend l'exemple du G8, l'analyse des données qui nous ont été fournies montre que certains de ses membres ont atteint, voire dépassé leurs engagements et méritent nos éloges.» Le Président souhaite que «les autres partenaires puissent également honorer rapidement leurs engagements». De plus, s'il est relativement facile de mesurer en termes de pourcentage du PIB la performance d'un pays en matière d'aide publique au développement, «l'exercice se révèle plus ardu quand il s'agit d'évaluer les apports aux initiatives spéciales lancées par plusieurs Sommets du G8». Indépendamment de ces interrogations, Bouteflika tire certaines conclusions. La première a trait au volume de l'Aide publique au développement de l'Afrique. Le Sommet de Gleneagles (2005) avait promis d'augmenter l'Aide publique au développement destinée à l'Afrique, de 25 milliards de dollars par an à l'horizon 2010. Selon l'Ocde, cette augmentation n'atteindra cette année que 7,6 milliards de dollars, soit 17,4 milliards de moins que le niveau décidé par le G8 à Gleneagles. La deuxième conclusion concerne l'insuffisante adaptation de l'orientation de l'aide aux priorités du Nepad et des pays bénéficiaires. C'est ainsi, constate le Président, «que l'agriculture est le parent pauvre de l'aide. Ses infrastructures ont été négligées au motif que le secteur privé était le mieux indiqué pour y investir. La troisième remarque est l'impact négligeable que l'assistance a eu sur le développement des capacités nationales des pays bénéficiaires. La conception de l'aide est otage des procédures et normes des pays donateurs, elle contourne les systèmes nationaux et contribue donc très peu au transfert de savoir-faire et au renforcement des institutions des pays récipiendaires.» «Nous estimons aujourd'hui que l'Aide publique au développement, pour être efficace et atteindre effectivement les objectifs qui lui sont assignés, a besoin d'être repensée de manière à l'adapter aux priorités du Nepad qui s'inscrit dans le cadre du développement du continent.» D'autres questions fondamentales abordées par le Partenariat n'ont pas connu d'avancée notable: en matière de financement du développement, beaucoup d'espoirs étaient fondés sur l'expansion des exportations africaines et l'accès aux marchés des pays développés. Ces ressources étaient censées remplacer progressivement l'Aide publique au développement. Or, les négociations du cycle de Doha des négociations commerciales multilatérales sont toujours dans l'impasse. Les investissements directs étrangers des pays du G8 n'ont pas atteint le rythme escompté. Pour Bouteflika, l'Afrique s'estime en droit d'être représentée de manière juste et équitable au G20 à travers certains de ses membres afin qu'elle soit partie intégrante de ce forum qui a désormais la charge de la gouvernance mondiale et de participer pleinement à tous les processus de concertation, de négociation et de prise de décision.