Le jeu du chat et de la souris se poursuit entre l'administration et les squatteurs des baraques. Sans toit, sans destination, sans nourriture et sans assistance, une centaine de familles trouvent refuge aux abords de l'autoroute à Baraki, Alger. Personnes âgées, enfants, jeunes des deux sexes, ne trouvent que l'ombre des arbres comme abri. En effet, des dizaines de familles se sont retrouvées, ces deux derniers jours, «abandonnées» en pleine autoroute dans l'axe situé au niveau de Baraki. Pour faire entendre leur voix, des dizaines de jeunes ont fermé hier l'autoroute, dans ses deux sens, et ce, à l'aide de pneus brûlés, de blocs en béton, de cailloux et de troncs d'arbres. Le couloir réservé aux urgences, est occupé par des dizaines de camions chargés du déménagement des familles. L'autoroute était complètement paralysée dans la matinée d'hier. Les automobilistes ont souffert le martyre sous une chaleur qui avoisinait les 40°C. Comment en est-on arrivé-là? Le logement! Toujours et encore le logement. Mais...il y a toujours un petit mais. A l'aube de lundi dernier, des responsables de la mairie de Bab Ezzouar et les services de l'habitat de la wilaya d'Alger, avaient entamé l'opération de relogement des familles habitant le bidonville El Djazira. Tous les habitants ont plié bagages à destination de leurs nouvelles habitations au niveau du site de Baraki. Une fois sur site, des voix s'élèvent pour dénoncer leur «exclusion» de la liste des bénéficiaires. «Ce sont les services de l'APC de Bab Ezzouar qui nous ont déménagés. Nous nous considérons donc, concernés au même titre que les autres. A la grande surprise, plusieurs noms de famille, y compris le mien, ne figurent pas sur la liste des bénéficiaires», a déclaré Merbah, âgé d'une quarantaine d'années. Et de s'interroger, le front en sueur: «Avec quels paramètres a-t-on arrêté la liste des bénéficiaires? Nous sommes tous des habitants de ce bidonville, non?Pourquoi certains ont bénéficié de logements, alors que d'autres ont été exclus?». Si ces questions taraudent l'esprit de Merbah et «ses voisins», l'administration par contre semble avoir des réponses à toutes les préoccupations des citoyens. Les responsables de l'opération avancent qu'ils ont agi à la suite d'une étude «approfondie qui a été établie sur la base de plusieurs visites inopinées afin de s'assurer de la situation réelle des familles qui occupaient les baraques». Mohamed Smaïl, directeur de l'habitat de la wilaya d'Alger, apporte des éclaircissements concernant les familles non relogées. D'emblée, il précise: «Aucune famille ne sera lésée. L'Etat ne lèsera aucun citoyen de ses droits», a-t-il déclaré dans une communication téléphonique avec L'Expression. Et d'ajouter: «Il se peut que des familles soient oubliées mais elles seront toutes relogées sans aucun problème.» M.Smaïl revient d'ailleurs, sur le cas des habitants de la cité d'El Djazira avançant deux raisons pour lesquelles ces familles n'ont pas été relogées. «Plusieurs familles n'ont pas constitué les dossiers qui leur étaient demandés. Depuis plusieurs semaines les services concernés leur demandent, vainement, des dossiers. Il y a toujours des papiers qui manquent», a t-il expliqué. Et de préciser que cette catégorie de gens seront rétablis dans leur droit une fois que leurs dossiers seront complets. «Quelques familles n'ont pas été relogées, mais elle ne sont pas exclues de la liste». M.Smaïl précise que des commissions de daïra travaillent en collaboration avec la wilaya d'Alger pour traiter tous les dossiers. «Une fois tous les dossiers étudiés, on procèdera au relogement de ceux qui le méritent». Sur sa lancée, le responsable de cette opération au niveau d'Alger, affirme que les services de la wilaya travaillent jour et nuit pour assurer la transparence dans le déroulement de cette opération. L'autre argument avancé par M.Smaïl est lié au dernier recensement effectué dans cette cité. Selon la même source, l'opération de relogement concerne uniquement les familles qui ont été prises en considération dans l'opération de distribution partant des statistiques de 2007. «Pour nous, seuls ceux qui ont été recensés avant 2007, sont concernés par cette opération», a-t-il affirmé. Et d'indiquer qu'une trentaine de familles sont venues à la cité après 2007 et qu'il existe plusieurs baraques fermées que les propriétaires utilisent de façon spéculative. Ainsi de nombreuses familles ne savent plus déjà quel sera leur sort. «La baraque que j'habitais avec ma famille est complètement rasée. Le logement! je n'en ai pas bénéficié. Je ne sais plus où je vais me retrouver avec ma petite famille!», s'est inquiété un père de famille. Cette inquiétude exprimée par ce citoyen, constitue un moindre souci pour l'administration. «Les squatteurs n'auront qu'à retourner là d'où ils sont venus», répond M.Smaïl. Et d'être plus précis. «Ceux qui sont venus après 2007 et ceux qui ne présentent pas de bons dossiers complets n'ont qu'à repartir d'où ils sont venus». Sur un ton rassurant, ce responsable a promis que l'opération de relogement se fera dans une transparence totale et ceux qui méritent d'être relogés, «ils le seront bel et bien»... Il est clair, que pour les nouveaux venus à la cité El Djazira ils n'ont pour seul choix que d'opter pour un autre bidonville ou repartir d'où ils sont venus, car leurs baraques ont été rasées et les abords de l'autoroute n'ont jamais constitué un abri.