La consistance de l'enveloppe financière, au titre du plan quinquennal 2010-2014, qui atteint 415 milliards de DA, atteste de l'ambitieux programme de remise à niveau et de réhabilitation de la grande métropole de l'Est. Le wali de Constantine a toutes les raisons du monde pour exprimer son entière satisfaction. Il vient de gagner son pari puisque son plan de modernisation de l'antique Cirta n'a pas seulement reçu l'aval du gouvernement, mieux, il est soutenu par les hautes autorités du pays. La consistance de l'enveloppe financière allouée à cette wilaya au titre du plan quinquennal 2010-2014 et qui est à la mesure de ses objectifs, soit de l'ordre de 415 milliards de DA, ressemble fort à un feu vert accordé par le chef de l'Etat à un ambitieux programme de remise à niveau et de réhabilitation de la grande métropole de l'Est, et la finition des nouvelles réalisations initiées à partir de 2005. Sauf imprévu, Abdelmalek Boudiaf sera donc probablement épargné par le prochain mouvement attendu dans le corps des walis et annoncé par le ministre de l'Intérieur. En tout cas, cette lecture, loin d'être originale, est renforcée par la teneur hautement stratégique des projets lancés ou en voie de lancement et dont l'objectif est de redonner à Constantine le statut et la dimension de métropole de l'Est. Dans le domaine de l'urbanisme et de l'habitat, la nouvelle ville Ali-Mendjeli intégrée à l'espace urbain de Constantine, constitue incontestablement la plus importante réalisation depuis l'Indépendance, née en pleine tragédie nationale et réalisée en douze ans au lieu des vingt-cinq ans prévus. C'est le lieu de résidence, aujourd'hui, de plus de 180.000 habitants. Ali-Mendjeli, la nouvelle ville Elle constitue, malgré les nombreuses imperfections, une réalité urbaine non négligeable. De nombreux architectes qui ont eu à s'exprimer sur le sujet ont relevé des défaillances au plan de l'aménagement de cet immense pôle urbain appelé dans moins de cinquante ans à devenir le vrai coeur battant de la ville du Vieux Rocher. Sollicités afin de donner leur avis, des urbanistes qualifient la nouvelle ville Ali- Mendjeli d'entité sans âme et sans repères. Selon ces mêmes avis d'experts, cette cité n'offre aucun cadre pour une vie communautaire au sens sociologique du terme. Les milliers de familles qui ont été relogées ont apporté avec elles leurs habitudes et leurs pratiques sociales qu'elles ont reconduites dans un milieu froid et bétonné où il n'y a aucune chance de se regrouper et de tisser de nouveaux liens collectifs. De nombreux relogés ont l'impression d'avoir été «expulsés» de Constantine et coupés de leurs repères. C'est donc dans le but d'effacer toutes ces lacunes qu'un programme dit de «rattrapage» est en voie de conception pour être concrétisé à l'horizon 2014. Pour le wali, les projets structurants lancés à Ali-Mendjeli, à l'image de la ville et du pôle universitaire, doivent être valorisés suivant une vision «moderniste mais également logique». Le plan quinquennal 2010-2014, selon le directeur du logement et des équipements publics, dotera la nouvelle ville d'un ensemble de centres d'intérêt, qui vont donner certainement plus de cohérence et de lisibilité aux différentes «unités de vie» dont la conception a été jugée plus ou moins désordonnée. Dans ce même contexte, le wali a affirmé que cette nouvelle ville sera dotée de deux ou trois parkings à étages susceptibles de contenir l'important flux d'automobiles sans cesse en augmentation, transitant par ce nouveau carrefour entre le sud et le nord- est du pays. On relèvera que parmi les projets d'envergure implantés à Ali-Mendjeli, il y a la ville universitaire. Unique en son genre, le projet dont les travaux ont atteint un taux de réalisation de 60%, est certainement le plus grand à l'échelle nationale. Il s'étale sur une superficie globale de 170 ha constituant l'assiette foncière sur laquelle seront implantées dix facultés d'une capacité d'accueil estimée à 44.000 places pédagogiques, 19 résidences universitaires d'une capacité d'hébergement de 38.000 lits, un complexe sportif en plus de 1500 logements collectifs et 60 villas de haut standing destinées aux recteurs, doyens et enseignants de la nouvelle université. Il s'agit d'un projet grandiose, dont la réalisation, confiée à des entreprises chinoises, est estimée à 25 milliards DA. L'autre projet non moins important et qui concerne toujours le secteur de l'enseignement supérieur, est le pôle universitaire réalisé durant le quinquennal 2005-2009 et dont plus de 90% des structures ont été achevées et livrées. Ce pôle s'étale sur une superficie de 40 ha et regroupe 5 facultés d'une capacité de 4000 places pédagogiques chacune. Un pôle médical de grande envergure Parmi les projets ambitieux inscrits au programme de modernisation de la wilaya de Constantine et qui avait fait l'objet d'une rencontre de travail entre le wali et les professeurs en médecine, figure le projet d'un deuxième CHU régional. Celui du lancement de l'avis d'appel d'offres national et international est prévu pour cet été. L'assiette foncière, d'une superficie de 150 ha, a été acquise grâce à l'engagement personnel du wali. Le terrain est situé à la nouvelle ville Ali-Mendjeli. A ce sujet, le directeur de la santé n'a pas manqué de rappeler à plusieurs occasions l'opportunité d'un tel projet. «Il nous a fallu trois ans pour ficeler ce dossier et convaincre les financiers. Les arguments que nous avons avancés se résument comme suit: - il était temps que Constantine se dote d'un nouveau CHU car il ne faut pas oublier que l'actuel centre hospitalo-universitaire date de 1865 - Constantine connaît une très grande concentration de compétences qui commencent à se sentir à l'étroit - Constantine est une grande métropole, il est tout à fait normal que les décisions qui la concernent soient plus ou moins d'ordre politique.» Au-delà du l'estimation financière qui est de 10 milliards de DA, l'infrastructure en question sera d'un apport appréciable au secteur de la santé. Il va sans dire que son entrée en service mettra certainement fin au calvaire enduré par des milliers de patients provenant des wilayas de l'Est que le vétuste CHU Dr Benbadis, datant de l'époque coloniale, n'arrive plus à contenir. Nous ne fermerons pas ce dossier sans signaler que le nouvel hôpital régional d'application de l'ANP (qui remplace celui de Didouche-Mourad, dans la banlieue de Constantine) est opérationnel. Il est lui aussi situé à Ali-Mendjeli. Cette importante structure de médecine militaire devait être inaugurée par le président de la République, mais le déplacement de celui-ci avait été reporté à trois reprises pour des raisons liées à l'agenda du chef de l'Etat. Toujours est-il que l'hôpital fonctionne aujourd'hui et est doté d'un équipement sophistiqué et d'un encadrement de haute qualification. Encore un autre projet initié par le wali, mais cette fois-ci à la périphérie de Ali-Mendjeli: Le «boulevard» des cliniques. Celui-ci va regrouper un nombre important de cliniques privées, toutes spécialités confondues, sur un même site spécialement aménagé. Bien sûr, le domaine de l'aménagement et du transport n'est pas en reste, le pont géant qui a fait couler beaucoup d'encre, tant à cause de son utilité jugée par certains comme discutable qu'à cause de son coût qualifié comme franchement extravagant, a quitté ses habits de projet. Les travaux confiés à une entreprise brésilienne ont été lancés. Le tramway est un projet qui avance lentement à cause de la nature accidentée du terrain et des risques de glissement de terrain, mais l'idée de renforcer la ligne existante avec deux autres nouvelles lignes, fait son chemin. D'ailleurs, les Constantinois ont été invités par le biais de la radio locale à faire des propositions sur les itinéraires les plus porteurs. On ne peut disserter sur le plan de modernisation de Constantine sans évoquer la part du lion qui revient incontestablement à l'habitat et au logement. En effet, plus de 100 milliards DA seront consacrés à la réalisation de 26.500 logements, tous segments confondus. Aussi, le planning arrêté par les services de la Dlep à cet effet a été conçu pour livrer entre 5.000 et 6000 logements par an, étant donné que le gros problème du foncier dont souffre Constantine semble avoir été réglé. En parallèle, un budget de 10 milliards DA a été dégagé dans le but de conduire des opérations d'amélioration et de requalification au niveau de 106 sites urbains à travers la wilaya. A travers ce tableau, il ne faut surtout pas croire que tout baigne dans l'huile. Il est vrai que le plan de modernisation rencontre quelques réticences suscitées par des sujets qui ne font pas encore l'unanimité, à l'image de la question de la démolition de la prison du Coudiat. Pour le wali, «elle sera démolie tôt ou tard, car il est impératif de reconnaître enfin que le caractère historique de cet édifice pénitentiaire qui constitue certes un pan de la mémoire de la ville ne doit plus être utilisé comme un alibi pour entraver le processus de modernisation adopté par la wilaya». La démolition de cette prison située en plein centre-ville donnera également lieu au transfert du groupement de la Gendarmerie nationale mitoyen vers une nouvelle structure en construction sur les hauteurs de la ville. L'assiette foncière libérée sera investie pour la réalisation de projets structurants prévus par le plan de modernisation de la métropole de Constantine. Pour le moment, rien n'est encore décidé, car il faut s'attendre à une levée de boucliers de la part des opposants à la démolition de cette prison où ont été enregistrées dans la douleur, des pages entières de la glorieuse Révolution de Novembre 54. Les défenseurs de la mémoire de Constantine auront-ils le temps et le pouvoir nécessaires pour faire reculer le wali? Il est à rappeler que l'histoire de cette prison reste intimement liée à celle d'un des grands héros de la guerre de Libération nationale, Mostefa Benboulaïd, le chef de la wilaya I historique et un des principaux organisateurs du déclenchement de la lutte armée, le 1er Novembre 1954. Son évasion de ce pénitencier où il a été détenu demeure un fait marquant du combat libérateur. Et si l'on demandait l'avis des des Constantinois, rien que pour voir? Polémique sur la prison du Coudiat Dans le cas où la prison du Coudiat serait rasée, que va-t-on faire de l'espace ainsi, libéré? En fait c'est une question récurrente que se posent tous les Constantinois qui ne comprennent toujours pas le pourquoi de la démolition de ce qu'ils considèrent comme un des monuments, un lieu de mémoire de la ville. D'autant plus que le centre névralgique de la ville est appelé à terme à être déplacé vers Ali-Mendjli, Sidi Mabrouk, le Hamma et Massinissa, les nouveaux pôles de développement de cette grande métropole. Or, jusqu'à l'heure actuelle, les autorités locales n'ont pas précisé ce par quoi elles vont remplacer la prison du Coudiat. C'est le même questionnement qui se pose au niveau du quartier du Bardo, rasé il y a environ une année afin d'abriter, a-t-on laissé entendre, une cité administrative (Hôtel de Ville et de wilaya, diverses directions régionales des démembrements de l'Etat), des hôtels de luxe, des établissements de prestige et une salle d'opéra! A l'heure actuelle, les terrains sont toujours déserts et aucune activité n'y apparaît. Ce qui n'a pas manqué d'ouvrir la voie aux rumeurs les plus folles concernant la destination de ce «trésor» foncier. Reste le mythique stade Benabdelmalek Ramdane qui a vu sa tribune démolie afin de céder le passage au tramway. La wilaya projette de le reconstruire selon une nouvelle configuration en le dotant d'infrastructures modernes. En attendant, rien ne vient, alors que les équipes sportives de la ville sont obligées de recevoir en compétition dans les villes voisines. Moderniser Constantine est une excellente chose, encore faut-il que cela soit fait avec méthode et cohérence, tout en préservant l'âme de la vieille ville.