Détention illimitée, tribunaux d'exception, manque de transparence, «tirs ciblés» par des drones: une organisation américaine de gauche reproche à Barack Obama d'avoir abandonné ses principes et de marcher dans les pas de son prédécesseur en matière de sécurité nationale. Dans un bilan fait 18 mois après l'arrivée du président démocrate à la Maison-Blanche, la puissante Association américaine de défense des libertés civiles (Aclu) estime que l'administration Obama «risque d'établir une nouvelle norme conforme aux pires choix de l'ère Bush» en matière de sécurité nationale. Le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a critiqué ce bilan, assurant qu'«il existe des évaluations très différentes» des mesures prises par l'administration depuis janvier 2009. «A chaque fois, quelqu'un suggère, à tort à mon sens, que nous agissons de manière radicalement différente (de George W.Bush) et que les mesures que nous prenons ne permettent pas de garantir la sécurité» des Etats-Unis, a-t-il expliqué. «Il est ironique de voir que, dans ce débat, quelqu'un dit complètement l'inverse». Dans son étude, l'Aclu explique que les bonnes intentions du candidat Barack Obama d'interdire la torture, de fermer Guantanamo ou de garantir la transparence de son gouvernement se sont petit à petit émoussées, jusqu'à parfois être abandonnées. «Malheureusement la situation s'est répétée à chaque fois pendant les premiers 18 mois de cette administration: une importante réussite a été suivie par un recul», regrette l'Aclu. A mettre au Panthéon personnel de M.Obama, selon l'association, les décrets interdisant la torture, ordonnant la fermeture de Guantanamo et celle des prisons secrètes de la CIA signés au lendemain de son investiture à la Maison Blanche, et la publication de documents ultra-sensibles de l'ère Bush jetant une lumière crue sur un système autorisant la torture au plus haut niveau. En revanche, le choix de la détention illimitée sans procès pour une cinquantaine de détenus de Guantanamo est pour l'Aclu inacceptable même si elle reconnaît à l'administration «le mérite d'avoir libéré 67 prisonniers» de la prison la plus controversée du monde. Même commentaire pour le rétablissement, après réforme, des tribunaux militaires d'exception pour les «crimes de guerre». Une critique que l'administration rejette. «Les tribunaux militaires d'exception ont radicalement changé, un grand nombre d'améliorations ont été apportées et le texte a été adopté grâce à un consensus entre républicains et démocrates au Congrès», a rétorqué Greg Craig, ancien chef du service juridique de la Maison Blanche de M.Obama. «On ne peut pas dire ça de toutes les mesures, mais celle-ci a renforcé le principe d'une procédure équitable, cela montre une rupture avec l'administration Bush plutôt qu'une constance». Parmi les sujets qui fâchent, l'Aclu s'élève également contre l'augmentation affichée des assassinats ciblés par des drones, en particulier au Pakistan, y compris visant des citoyens américains. «Ce programme est une violation des lois internationales», regrette l'association qui rappelle qu'«il met en danger la vie d'innocents» et donne les clés à la CIA ou à l'armée américaine pour «imposer la peine de mort extrajudiciaire», alors que leurs capacités à identifier des coupables a été mise à mal par les centaines d'innocents passés par les geôles de Guantanamo.