Le chef de la diplomatie française savait que l'humanitaire français n'avait pratiquement aucune chance de sortir vivant de sa détention. Le ministre français des Affaires étrangères est passé aux aveux. Les chances de retrouver vivant l'otage français détenu par la branche d'Al Qaîda au Maghreb étaient quasiment nulles. C'est en tous les cas ce que nous apprenons aujourd'hui suite aux récentes déclarations du responsable du Quai d'Orsay. «Franchement nous n'avons jamais été optimistes. Aucune de nos tentatives de dialogue n'a abouti, nous avons tenté de lui faire passer des médicaments pour son coeur, car il était malade, et même ça, les ravisseurs l'ont refusé. Nous recherchons encore sa dépouille, mais ce sera très compliqué, celle de l'otage britannique exécuté par la même katiba, il y a un an, n'a jamais été rendue. Nous étions face à des gens déterminés à assassiner Michel Germaneau», a déclaré Bernard Kouchner dans une interview accordée au quotidien français Le Parisien. Le ministre français des Affaires étrangères qui, visiblement demeure sous l'onde de choc provoqué par l'exécution de l'humanitaire âgé de 78 ans, a reconnu l'impuissance de son pays à le faire libérer. Et quand bien même son raid sur une des bases de l'Aqmi se soit soldé par l'élimination d'un groupe de six membres de l'organisation terroriste islamiste, l'opération aura fait chou blanc. Une mission casse-cou? Cela ressemble plutôt à une mission de la dernière chance. A la desperado! «C'était notre dernière chance. Michel Germaneau est-il mort après? A-t-il succombé depuis longtemps à son affection cardiaque? Nous ne le savons pas. Les présidents mauritanien, nigérian et malien que j'ai vus cette semaine étaient tous persuadés qu'il n'y avait pas d'espoir. Parce que ce groupe terroriste est un des plus durs, qu'il a déjà tué à de multiples reprises. Le raid a été un succès militaire avec six activistes abattus, dont deux chefs. Nous avions tout ciblé pour que la tente où l'on pensait que Michel Germaneau pouvait se trouver ne soit pas touchée. Malheureusement, il n'y avait pas trace de lui», a indiqué Bernard Kouchner sur le site du journal français. L'Elysée qui, à travers la voix de Nicolas Sarkozy, avait promis de venger la mort de Michel Germaneau, semble davantage s'être engagé, aujourd'hui, dans la voie d'une lutte antiterroriste concertée au Sahel. Bernard Kouchner, qui au cours de son séjour dans la région donnait l'impression d'avoir privilégié l'axe Paris- Bamako, a élargi le champ de la coopération à d'autres Etats tout en citant nommément l'Algérie. «Il est essentiel qu'il y ait une collaboration plus étroite entre les pays de la région. Car il n'y a pas que le Niger, la Mauritanie et le Mali. Il y a aussi l'Algérie, le Maroc, la Libye, et même le sud de la Tunisie à être plus ou moins concernés par la situation. Les terroristes jouent là-dessus, ils se fichent pas mal des frontières qu'ils franchissent allégrement. Nous parlons d'une zone grande comme cinq ou six fois la France. Il y a des progrès à faire dans la mutualisation des moyens», a fait remarquer à ce sujet le chef de la diplomatie française qui a précisé qu'il n'y avait pas de menace directe sur les territoires des pays occidentaux tout en relevant le caractère international de la branche d'Al Qaîda au Maghreb dont le gros des troupes provient de milieux très défavorisés. «Il n'y a pas aujourd'hui de menace directe pesant sur nos territoires. Mais le danger est réel, Al-Qaïda au Maghreb islamique se nourrit de la pauvreté, de la misère. Elle a recruté des gens qui viennent du monde entier, on dit qu'il y a des Afghans dans ses rangs, des Yéménites, des militants qui viennent d'Afrique noire. Et elle sous-traite à des criminels locaux certaines de ses actions, comme les enlèvements», a souligné sur un ton inquiet Bernard Kouchner. Dans cette nouvelle redistribution des cartes qui a corrigé la stratégie de lutte antiterroriste, beaucoup plus proche maintenant de celle de l'Algérie, l'Aqmi tiendra-t-elle le coup? Ce qui reste sûr, c'est que le combat contre les groupes terroristes liés au grand banditisme sera plus efficace.