Placées sous le signe de la transparence, les premières législatives sous le règne de Mohammed VI ont été marquées par plusieurs incidents. Un taux de participation en net recul par rapport à celui de 1997, des incidents, des irrégularités et des tentatives de fraude signalées un peu partout dans le royaume et surtout une percée notable des islamistes. Ce sont là, les principales leçons que les observateurs ont tirées de ces premières législatives sous le règne du roi Mohammed VI. Considérées comme une valeur test de la démocratie dans ce pays, et placées sous le signe de la transparence, ces élections législatives - dont les autorités ont voulu faire un symbole de la «démocratisation» du royaume et auxquelles se sont présentés quelque 14 millions d'électeurs à travers 35.517 bureaux de vote pour choisir en un seul tour les 325 députés de la Chambre des représentants - ont été routinières pour ne pas dire semblables aux précédentes. Faits saillants, les incidents qui ont, selon l'Association marocaine des droits humains ( AMDH, indépendante), perturbé les opérations de vote dans la localité de Tiflet ( 50 km à l'est de Rabat), à la suite de protestations d'électeurs qui dénonçaient des irrégularités et autres «trucages constatés». «On a trouvé des bulletins de vote en dehors des bureaux de vote et on a constaté des achats de voix», a affirmé une responsable de l'Amdh qui suit les opérations du scrutin dans cette ville en qualité d'observateur. D'autres sources faisaient état de rupture de stocks de bulletins de vote dans certains bureaux toujours à Tiflet. Dans une lettre adressée au ministre marocain de l'Intérieur, Driss Jettou, le Parti de la justice et du développement (PJD) a dénoncé lui aussi des irrégularités et a demandé au ministre d'intervenir «immédiatement pour stopper ces irrégularités et inciter les autorités locales à assumer leurs responsabilités». Le PJD dénonce, entre autres, des pratiques d'achat de voix, citant des cas observés à Taza à l'Est, à Salé près de Rabat, à Fes à l'Est et assure également que «trois caïds dans la circonscription de Tétouan Nord», se sont rendu coupables d'actes de soutien illégal à des candidats. Il va sans dire que ces «dépassements» appréhendés avant le début de ce scrutin par une grande partie des électeurs ont eu des répercussions négatives sur la conduite de ce scrutin dans son ensemble. D'ailleurs, ce n'est pas par hasard que le ministère marocain de l'Intérieur a expliqué le long délai de publication des résultats de la consultation en arguant du fait de la complexité de la nouvelle méthode de dépouillement. «La lenteur prévisible de ces opérations se justifie par un ensemble de facteurs nouveaux», indique un communiqué de ce ministère rendu public par l'agence de presse marocaine MAP citant notamment «l'étendue de la circonscription, le nombre élevé des bureaux de vote, l'utilisation du bulletin unique, le double vote local et national», ainsi que «les modalités complexes de calcul des résultats». Par conséquent, et selon le communiqué du ministère marocain de l'Intérieur, les résultats seront diffusés «au fur et à mesure de leur proclamation par les commissions provinciales compétentes, à l'issue des opérations de contrôle et de validation, conformément aux dispositions de la loi». Néanmoins, d'ores et déjà et selon les premières indications et autres projections recueillies après la clôture des opérations de vote, une «importante progression» aurait été enregistrée par les islamistes modérés du PJD sur fond d'un faible taux de participation au scrutin dont le taux serait compris selon le ministre marocain de l'Intérieur, Driss Jettou, entre 52 et 55% (58,3% lors du précédent scrutin de 1997). De l'aveu de Driss Jettou lui-même, les islamistes du PJD qui comptaient 14 députés sur un total de 325 sièges, dans le Parlement sortant, pourraient voir leur représentation doubler dans la future Assemblée. Quant à l'influente association islamiste Al-Adl Wal Ihssane, elle a appelé au boycott de ces élections à l'instar des formations d'extrême gauche balisant la voie aux deux principales formations de la majorité actuelle, les socialistes de l'Usfp et les nationalistes de l'Istiqlal. Alors, dans ce cas de figure un deuxième «gouvernement d'alternance» semblable à celui mis en place en 1998 par le défunt roi Hassan II n'est pas à écarter.