Intrigant, surprenant, drôle dans ´´La Carte et le territoire´´, son dernier roman à paraître le 8 septembre chez Flammarion, l'écrivain provocateur et nihiliste Michel Houellebecq change de ton au profit d'une forme d'humour et d'autodérision prévalant sur la ´´désespérance humaine´´. Ecrivain français contemporain le plus traduit à l'étranger, Michel Houellebecq, 54 ans, est considéré comme l'un des plus novateurs de la décennie. Il met l'accent dans ses livres sur la misère de ´´l'humanité moyenne´´, française et européenne, frustrée et sans culture, écrasée au sein d'une société hyper-compétitive. Abandonnant l'analyse clinique et réaliste de ses obsessions et d'une société contemporaine à bout de souffle, l'auteur controversé des ´´Particules élémentaires´´ (1998) et de ´´Plateforme´´ (2001), plonge le lecteur dans l'histoire de Jed Martin, artiste-peintre et fils d'un célèbre architecte qui va connaître à son tour la célébrité en passant par plusieurs phases créatrices. Pour sa première grande exposition, Jed, personnage terne et fidèle anti-héros houellebecquien, demande à l'écrivain Michel Houellebecq, ´´un auteur célèbre, mondialement célèbre même, d'après Franz tout du moins´´, d'écrire le texte de son catalogue...Dans ce roman tiré d'emblée à 120.000 exemplaires, Michel Houellebecq ne se départit pas de ses réflexions sur la mort, le sexe, la reproduction, ´´l'impossibilité de vivre´´ ou l'existence humaine à ´´laquelle (Jed Martin) n'avait jamais adhéré´´, sans toutefois se livrer à ses habituelles provocations sur le tourisme sexuel, l'Islam ou les sectes. A la façon d'un Pierre Desproges ou d'un Woody Allen, il tord le cou au sérieux de son désespoir et se moque foncièrement de lui-même et des autres. Il s'attaque cette fois au monde de l'art et des affaires où chaque rencontre est prétexte à cooptation par l'entremise de médias tellement prévisibles qu'il n'a pas besoin de forcer le trait pour décrire leur mode de fonctionnement. Convoquant quelques figures médiatiques, littéraires, politiques et industrielles françaises dans des scènes surprenantes et parfois franchement hilarantes (l'écrivain Frédéric Beigbeder, le présentateur télé Jean-Pierre Pernaut, le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand....) l'écrivain s'en donne à coeur joie. Mais s'il règle, une fois de plus, ses comptes avec la presse française «il ne se passe pas une semaine sans que je me fasse chier sur la gueule par telle ou telle publication» - il se déchaîne aussi dans le portrait qu'il dresse de lui-même: un auteur alcoolique et dépressif. Lorsqu'il n'est pas vêtu de son éternel pantalon en velours côtelé, il porte un pyjama rayé gris qui le fait vaguement ressembler à un bagnard de feuilleton télévisé, il «pue un peu mais moins qu'un cadavre» et vit dans une maison ´´facile à reconnaître´´, avec ´´la pelouse la plus mal tenue des alentours et peut-être de toute l'Irlande´´. («La Carte et le Territoire», 428 pages, éditions Flammarion, sorti le 8 septembre)