Des sans-abri, des travailleurs de passage, des routiers et des ruraux... Ils sont nombreux à fréquenter les restaurants de la Rahma en ce mois de Ramadhan. 17 heures passées de quelques minutes, les jeûneurs commencent déjà à affluer vers les restaurants de la Rahma, éparpillés un peu partout dans la capitale. Ils s'installent trois heures avant la rupture du jeûne de peur de ne pas trouver de place. Lassés et épuisés, ils attendent patiemment l'heure de la «délivrance». Certains d'entre eux sont des sans-abri qui hantent, tout au long de l'année, les trottoirs des rues et des boulevards d'Alger. Ils passent quelque 12 heures sous un soleil de plomb avant de se diriger vers ces restaurants. D'autres sont des employés qui travaillent de nuit, obligés de se restaurer à moindres frais. Parmi eux, il y a des ruraux qui viennent à Alger des quatre coins du pays, espérant trouver une vie meilleure. «Tellement de gens pauvres dans un pays aussi riche, cette expression trouve tout son sens dans ces lieux...», constate Mounir, un bénévole dans un restaurant de la Rahma près de Belcourt. 19h00, le restaurant de la Rahma ouvert par la municipalité de Sidi M'hamed est déjà bondé. S'approchant du responsable pour l'aborder, il lâchera: «Vous ne pouvez pas rentrez! Il n'y a plus de place.» 45 minutes avant la rupture du jeûne, les retardataires désireux prendre place dans ce restaurant, doivent rebrousser chemin. «Il y a beaucoup de monde ici!», s'exclame le gérant. Sis au boulevard Hassiba-BenBouli, ce restaurant est d'une capacité d'accueil de 120 places. «Mais en général, on sert près de 140 plats et parfois 144», précise-t-il. «Chaque année, l'APC de Sidi M'hamed ouvre un restaurant aux personnes démunies. Elle lui consacre un budget. Malheureusement, cette année, il y a peu de plats», s'échine-t-il à expliquer. Au menu en ce deuxième jour de Ramadhan, de la chorba bien évidemment, une salade, un plat de résistance, un dessert et une limonade. Dans ces restaurants de la Rahma, les habitués ne sont pas seulement des vieillards abandonnés, des pauvres miséreux ou encore des SDF. On y trouve surtout des jeunes chômeurs. «Les gens qui viennent ici pour manger sont de différentes tranches d'âge. Ils préfèrent venir ici pour la qualité des produits qu'on propose...», souligne-t-il. «En général, il y a deux vagues, il y a ceux qui viennent avant la rupture du jeûne et ceux qui viennent après l'Adhan, c'est la deuxième vague, c'est comme une seule famille, ils parlent, ils discutent...», ajoute-t-il. «Chaque année, il y a plus de bouches à nourrir, il y a de plus en plus de pauvres dans ce pays...», s'étonne Karim, le gérant d'un restaurant à la place Audin. Même si le menu proposé par ce restaurant est de 300 DA, celui-ci n'hésite pas à faire des exceptions. «Les restos de la Rahma ne peuvent pas absorber tout le monde, donc on fait parfois des exceptions pour les personnes qui sont dans le besoin.» En cette période, ce sont les plus démunis qui reçoivent souvent de plein fouet les retombées du marasme économique dans lequel baigne le pays. «Il y a des années, certains, fiers ne franchissaient pas les portes de ces restos. Ils parvenaient, à joindre les deux bouts. C'est plus le cas aujourd'hui, malheureusement. N'ayant plus le choix, ils viennent pour manger ici comme tout le monde», fait savoir un gérant d'un restaurant. En dépit du contexte social et économique du pays, la solidarité continue à jouer un grand rôle. A quelques mètres se dresse le foyer des cheminots que gère l'Ugta, aménagé en restaurant de la Rahma. Ce dernier ouvre ses portes durant tout le mois sacré. Lancé en 1963, ce restaurant a une capacité de quelque 300 places. «Le menu est toujours varié, il y a la chorba parfois avec du frik parfois aux vermicelles, un plat de résistance et un dessert», note le responsable de ce restaurant du coeur. «On attend des dons de limonade qui arriveront prochainement.», ajoute-t-il.