Sarkozy a choisi de fortement médiatiser les expulsions des Roms et a fait un lien officiel entre immigration et insécurité. Ce qui lui a valu des critiques à l'ONU, comme dans la presse américaine. La France, critiquée pour sa politique d'expulsions de Roms, estime n'avoir «pas de leçon à recevoir» au lendemain du renvoi très médiatique de 86 Roumains, motivé par la lutte contre l'insécurité, et qui devait être suivi vendredi dans la journée de 139 autres. «La France est le pays d'Europe le plus respectueux en matière de droits des étrangers et notamment des étrangers en situation irrégulière, ou -soyons plus modestes- l'un des pays les plus respectueux, donc nous n'avons pas de leçons à recevoir», a assuré le ministre de l'Immigration, Eric Besson. Il a indiqué que 139 Roms devaient quitter Paris vendredi (hier) en début d'après-midi en bénéficiant de «l'aide au retour humanitaire» (300 euros par adulte et 100 euros par mineur) et, d'ici la fin du mois d'août, le nombre des personnes reconduites devrait atteindre «à peu près 850». Ces expulsions, les premières depuis les annonces sécuritaires de Nicolas Sarkozy fin juillet, ne sont «qu'une accélération d'un processus qui est de toute façon à l'oeuvre» puisque «27 vols de ce genre ont eu lieu depuis le début de l'année», a-t-il relativisé. Les Roms seraient 15.000 en France, où ils vivent souvent dans des squats. La ministre de la famille, Nadine Morano, les a accusés d'exploiter leurs enfants à des fins de mendicité et de trafics, ce qui a conduit un député socialiste, Arnaud Montebourg, à lui reprocher d'instaurer «une sorte de racisme officiel». En Roumanie, la politique française passe mal. «J'ai le sentiment que l'on stigmatise un groupe dans son ensemble. C'est contraire à la tradition française de respect des droits de l'homme. Cela donne une mauvaise image de la France», a déclaré au journal Le Parisien Valentin Mocanu, secrétaire d'Etat à la Solidarité, chargé dans son pays du dossier des Roms. La presse roumaine dénonçait également une «hypocrisie» française. «Renvoyer les Roms d'un lieu vers un autre, sans leur donner d'alternative, aggrave les choses même si l'image transmise est que cela résout le problème», estime dans le premier quotidien du pays Adevarul (La vérité) Oana Marinescu, consultante spécialisée dans les affaires étrangères. Paris et Bucarest se rejoignent cependant pour demander davantage de mobilisation de l'UE. Le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux «attend que la Commission européenne démontre toute sa valeur ajoutée dans l'accès des Roms à l'éducation, à l'emploi et au logement par exemple» alors que le président roumain Traian Basescu a réclamé un «programme européen d'intégration des Roms». Mais Bucarest se voit reprocher à Bruxelles de ne pas présenter de projets concrets pour utiliser les aides européennes massives disponibles depuis l'adhésion de la Roumanie à l'UE. Les Roms sont entre 530.000 et 2,5 millions en Roumanie. Si Bucarest a fait des progrès dans l'accès à l'éducation, les Roms souffrent encore de discriminations sur le marché du travail et dans le domaine du logement. La France n'est pas le seul pays européen à faire face à la question rom et à pratiquer des expulsions, mais Nicolas Sarkozy a choisi de fortement médiatiser ces actions et a fait un lien officiel entre immigration et insécurité. Ce qui lui a valu des critiques à l'ONU, comme dans la presse américaine où il a été accusé par le New York Times «d'attiser dangereusement les sentiments anti-immigrés». Pour Theodore Shaw, professeur à l'université Columbia de New York et expert sur les droits civiques, «la violence contre les Roms est déjà très banale, particulièrement en Europe centrale». «Si le gouvernement (français) cible les Roms, alors ceux qui sont déjà engagés dans la xénophobie se trouveront confortés», a-t-il ajouté.