Si officiellement, l'Espagne a demandé des éclaircissements à Rabat quant aux mauvais traitements subis par ses ressortissants au Sahara occidental, son chef du gouvernement a, de son côté, préféré calmer le jeu. A partir de la Chine où il se trouvait pour l'inauguration de la Journée de l'Espagne à l'exposition universelle de Shanghai, José Luis Zapatero a estimé qu'«un principe essentiel de la politique étrangère est de maintenir de bonnes relations avec un pays voisin comme le Maroc». Le chef du gouvernement espagnol n'a vraisemblablement pas envie de souffler sur la braise. La secrétaire à la politique internationale et à la coopération du parti socialiste espagnol, le Parti socialiste ouvrier espagnol (Psoe), lui a emboîté le pas: «Nous devons protéger les droits fondamentaux des Espagnols, mais nous devons aussi respecter la loi quand nous ne sommes pas dans notre pays. Comme les étrangers quand ils viennent en Espagne», a déclaré Elena Valenciano. Le gouvernement espagnol est-il prêt à fermer les yeux sur le passage à tabac en règle subi par 14 de ses ressortissants qui manifestaient pacifiquement à El Ayoune, capitale du Sahara occidental occupé, contre les violations flagrantes des droits humains et l'occupation illégale du territoire par le Maroc? «Un groupe de policiers (marocains) en civil les a chargés sauvagement, arrêtés et conduits au commissariat. Deux militants ont été blessés à la tête et au corps par des coups de pied et de poing», a affirmé la Coordination espagnole de solidarité avec le Sahara occidental. En matière de preuves de violation des droits de l'homme par les forces d'occupation marocaines au Sahara occidental, la communauté internationale est dorénavant servie. A moins qu'elle ne fasse preuve d'hypocrisie ou de cécité complice. Si ce n'est des deux à la fois. C'est à l'image de la position de l'Espagne par rapport à la question de l'indépendance du Sahara occidental. Un conflit dont elle porte une responsabilité historique. Est-ce pour cela que le gouvernement espagnol fait le dos rond et laisse passer l'orage quant à ce qui s'est passé samedi dernier à El Ayoune? C'est probable! En effet, le torchon brûle déjà entre Rabat et Madrid et les contentieux pendants entre les deux capitales ne manquent pas. La souveraineté de l'îlot Persil (Leila), un territoire accidenté et inhabité, situé en Méditerranée, à 200 m de la côte marocaine et à 6 km à l'ouest de l'enclave espagnole de Ceuta, est âprement disputé par les deux pays. Tout comme les deux villes de Ceuta et Melilla qui sont revendiquées par le Maroc et constituent par conséquent, des foyers de tension permanents entre Rabat et Madrid. Ces «brouilles» latentes ont d'ailleurs été portées à leur paroxysme le 16 juillet dernier lorsque des policiers espagnols ont passé à tabac des ressortissants marocains à Melilla. Un incident qui a pris l'allure d'une minicrise diplomatique vite contenue par une intervention du chef du gouvernement espagnol qui a répondu aux sollicitations de Rabat qui réclamait des explications. «Aussi bien le ministre des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, que celui de l'Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, dont relèvent les forces de sécurité de l'Etat, oeuvrent à informer Rabat sur ces actes de manière à éviter que cela ne constitue un facteur qui entrave les relations entre les deux pays voisins», a tenu à préciser José Luis Zapatero. Les forces d'occupation marocaines ont-elles voulu rendre la monnaie de la pièce à leur voisin espagnol à travers l'agression dont furent victimes 14 de ses ressortissants à El Ayoune? Zapatero tendra-t-il l'autre joue? Ces questions qui resteront en héritage aux générations futures seront tranchées par... le cours de l'Histoire! Si les enclaves de Ceuta et Melilla, l'îlot Persil... demeurent des symboles d'une indépendance inachevée, le Maroc entend ne pas se faire «marcher sur les pieds» dans les territoires occupés du Sahara occidental...sauf qu'il doit compter avec le Front Polisario et le peuple sahraoui qui, malgré la répression aveugle qui lui est imposée, n'a pas encore abdiqué pour la conquête de son indépendance.