La réunion conjointe exceptionnelle à Bruxelles des ministres des Affaires étrangères et de la Défense des 28 pays de l'Otan portera essentiellement sur ce document de 11 pages rédigé par le secrétaire général. L'Otan débat jeudi de son nouveau «concept stratégique» adapté aux menaces du XXIe siècle alors que la France et l'Allemagne sont en désaccord sur un de ses éléments clés, les rôles respectifs de la dissuasion nucléaire et des systèmes antimissile. La réunion conjointe exceptionnelle à Bruxelles des ministres des Affaires étrangères et de la Défense des 28 pays de l'Otan portera essentiellement sur ce document de 11 pages rédigé par le secrétaire général Anders Fogh Rasmussen. L'Alliance atlantique doit adopter ce texte de référence à son prochain sommet les 19 et 20 novembre à Lisbonne. Mais Paris et Berlin, selon des diplomates, ont exprimé des points de vue incompatibles lors des débats préparatoires. La France, puissance nucléaire militaire, insiste sur le rôle irremplaçable de la dissuasion atomique. L'Allemagne croit à la possibilité de supprimer ce type d'arme grâce aux systèmes de défense antimissile. «Le contentieux porte sur la question de savoir si la défense antimissile doit être considérée comme un substitut» au nucléaire, position défendue par le chef de la diplomatie allemande Guido Westerwelle, «ou comme un complément à l'arsenal nucléaire», comme elle est présentée par les Français, a indiqué cette source. M.Westerwelle est co-signataire d'une lettre envoyée en février à M.Rasmussen par l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Norvège, demandant le retrait des dernières armes atomiques américaines d'Europe. Il s'agit de quelque 240 bombes largables d'avion entreposées dans les trois premiers pays cités ainsi qu'en Italie et en Turquie. Les Etats-Unis ont réussi à convaincre depuis les signataires qu'un retrait unilatéral de ces ogives priverait l'Occident d'une monnaie d'échange alors que Washington tente d'ouvrir avec Moscou des négociations sur les armes nucléaires tactiques (INF). Toutefois, M. Westerwelle n'a pas lâché prise. «Les Allemands auraient voulu qu'il soit écrit dans le concept stratégique que l'Otan doit s'engager dans le désarmement nucléaire, ce à quoi les Français ont dit non», a-t-on indiqué. M.Rasmussen est soucieux d'obtenir un compromis. La formule idéale, a-t-il redit lundi, serait de soutenir l'idée promue en avril 2009 à Prague par le président américain Barack Obama d'une «option zéro», c'est-à-dire d'un monde débarrassé à terme de toutes les armes nucléaires, mais de maintenir un arsenal atomique tant que d'autres puissances en détiendront. M.Rasmussen souhaite également qu'à Lisbonne les alliés donnent leur feu vert à la création d'un système antimissile protégeant le territoire et les populations européennes de l'Otan, tout en offrant à la Russie d'y coopérer. Déjà guère convaincue dans l'absolu des mérites de l'option zéro, la France voit dans la défense antimissile un système utile mais pas un parapluie de remplacement apte à garantir la sécurité des alliés. Le secrétaire général répète à l'envi qu'il n'en coûtera que 200 millions de dollars sur 10 ans aux 28 pays de l'Otan pour se greffer sur le système américain, les Etats-Unis ayant assumé les frais de recherche-développement. Les Français, selon un diplomate, ne voient justement pas d'un bon oeil que les Européens aggravent ainsi leur dépendance vis-à-vis de leur grand allié alors qu'ils réduisent par ailleurs leurs budgets militaires en raison de la crise financière.