Il remplit bien sa mission de témoin de l'histoire de la guerre de libération nationale. Mohamed Chérif Ould Hocine est à son troisième livre sur ce thème. Et la tâche est loin d'être terminée. Tant d'événements qui se sont déroulés en sept ans et demi de combat restent encore à faire connaître à la jeune génération. L'Expression: Des décennies après le 1er Novembre 1954, que peut encore représenter pour vous cette date? Mohamed Chérif Ould Hocine: En ma qualité de moudjahid, cette date représente un repère essentiel dans ma vie que je ne peux distinguer de l'histoire contemporaine de mon pays. Le 1er Novembre est une date charnière et c'est le début du combat pour la Libération. Aussi, permettez-moi de citer un de nos grands intellectuels qui a dit que le Premier Novembre est une date dans le temps mais l'esprit de Novembre est l'horizon du temps. En quoi la transmission de ce patrimoine est-elle importante? Il s'agit de la nécessité de prolonger le combat de la génération de Novembre. Celle-ci se doit d'achever sa mission en transmettant le flambeau d'une des plus grandes révolutions du XXe siècle. Cinquante ans après l'accession à l'indépendance de notre pays et à un moment où de grandes figures de la Révolution disparaissent, il est urgent que chacun des acteurs encore en vie, quel que fût son niveau de responsabilité lègue aux jeunes générations, son témoignage sous quelque forme que ce soit. Des lycéens et des universitaires ont besoin de connaître leur histoire. Et mes livres sont présents dans plusieurs bibliothèques du pays. Est-ce que les témoignages des moudjahidine sont suffisants pour transmettre cette mémoire? Ce ne sont pas tous les témoins de l'époque qui ont consenti à mettre leurs mémoires noir sur blanc. Il y a un grand vide dans le domaine de l'écriture de l'histoire qu'il est urgent de combler. Il n'est pas trop tard pour écrire. En ce qui vous concerne, vous n'avez pas hésité à apporter votre témoignage... J'ai commencé ce travail en écrivant Au coeur du combat. J'y ai relaté ce que j'ai vu en participant à la guerre de Libération. J'y ai évoqué la mémoire des chouhada. Des récits concernent les accrochages, les attentats et les embuscades auxquels j'ai participé. Des photos et des documents authentiques accompagnent ces récits. Pendant la Révolution, j'avais un petit carnet sur lequel je notais les principaux événements qui se déroulaient sur les lieux des combats. J'ai aussi la chance d'avoir une bonne mémoire, ce qui m'a permis de mener cette tâche à bien. Il y a aussi un deuxième livre... Eléments pour la mémoire, afin que nul n'oublie est un livre axé sur des faits qui se sont déroulés dans les wilayas. Il y a aussi des informations sur l'Organisation spéciale et le Groupe des 22 avec des biographies et des portraits. Ce ne sont là que quelques exemples du contenu de ces témoignages. En 2010, il y a un troisième livre... Ce dernier remonte jusqu'au début de la colonisation en donnant des informations sur la résistance algérienne. Le livre aborde aussi les événements de 1945 pour remonter à la genèse du 1er Novembre. Quelle a été votre méthode de travail? J'ai effectué de nombreuses recherches pour retrouver les noms des combattants que je ne connaissais que par leurs prénoms. J'ai aussi cherché leurs photos comme je me suis basé sur les archives des journaux français de l'époque. D'ailleurs, il n'y a pas eu que des Algériens à lutter pour l'indépendance puisqu'il y a eu aussi des Algériennes et même des Français... C'est pour cette raison que je parle de Fernand Yveton, Henri Maillot, Pierre Chaulet et de son épouse ainsi que de Djamila Bouhired et d'Yveline Lavalette. J'évoque aussi le combat qui s'est déroulé à la Fédération de France. Ces livres sont autant d'éclairages sur plusieurs aspects de la Révolution. On apprend aussi que des Algériens se battaient contre des Algériens... Bellounis et les bachagas n'hésitaient pas à mobiliser des Algériens contre la Révolution et nous les avions combattus.