Le gouvernement français vient de mettre un terme au seul moyen d'accès, gratuit, aux soins pour quelque 200.000 sans-papiers. Les harraga et les candidats à l'immigration clandestine qui auront opté pour L'Hexagone devront se débrouiller pour être pris en charge au cas où ils tomberaient malade. L'image de la France généreuse, qui accueille toute la misère du monde, s'effrite. Les députés de la majorité présidentielle, l'UMP, a mis fin, mardi dernier, à un dispositif vieux d'une dizaine d'années et qui permettait aux immigrés clandestins de pouvoir se faire soigner sans débourser un sou. Désormais, pour bénéficier de cette fameuse AME, aide médicale de l'Etat, l'étranger en situation irrégulière devra payer la somme de trente euros. Officiellement, les amendements qui ont été apportés à cette disposition, à caractère hautement humanitaire, consistent à mettre un frein à son coût jugé trop onéreux. Le ministère français de la Santé fait état d'une facture qui s'élèverait à quelque 540 millions d'euros en 2010. Une hausse estimée à 13% par rapport à l'année 2009 mais qui incombe, d'après certaines statistiques, au nombre de déboutés du droit d'asile en constante augmentation, ou encore au basculement vers l'AME de certains ressortissants originaires de la Communauté européenne sans emploi ou en situation de précarité. Vu sous cet angle, l'argument selon lequel l'explosion de l'enveloppe financière consacrée à l'aide médicale de l'Etat serait la conséquence du nombre croissant des sans-papiers, devient fallacieux. Les députés de la majorité ne cessent de parler «d'abus» et de «fraudes» tout en faisant croire que cette catégorie de la population bénéficierait de soins de meilleure qualité que les autres Français. Ce cliché est battu en brèche par «Médecins du Monde»: «Ces personnes sont dans une logique de survie, pas une logique d'abus. Quant à l'appel d'air que pourrait créer l'AME pour les futurs migrants, c'est un mythe. La quasi-totalité des migrants atteints d'une pathologie grave ne découvrent leur maladie qu'une fois arrivés en France», a tenu à préciser l'association humanitaire. «Certains députés affirment que les étrangers bénéficiaires de l'AME seraient mieux soignés que les autres assurés. C'est un pur fantasme. Il existe déjà un retard aux soins important pour les bénéficiaires de l'AME, qui ne viennent consulter un médecin que lorsque leur état de santé est déjà détérioré. Si on l'institutionnalise, ce sera très grave en termes de santé publique et en termes de coût, car la prise en charge d'une maladie grave est toujours plus coûteuse que la prévention», ajoute de son côté Marie Hénocq, de la Cimade. La réalité est toute autre, l'actuel locataire de l'Elysée, qui ambitionne de signer un nouveau bail de cinq ans avec les Français, part à la conquête de l'important réservoir électoral que constitue l'extrême droite pour tenter de se faire réélire en 2012. «Nous subissons les conséquences de 50 années d'immigration insuffisamment régulées qui ont abouti à un échec de l'intégration. Nous sommes si fiers de notre système d'intégration, peut-être faut-il se réveiller pour voir ce qu'il a produit. Il a marché, il ne marche plus», avait déclaré Nicolas Sarkozy dans un discours musclé qui ciblait les immigrés non européens. Le chef de l'Etat français avait en outre souhaité «que l'on évalue les droits et les prestations auxquels ont aujourd'hui accès les étrangers en situation irrégulière». Chose dite chose faite. En termes plus clairs, il s'agit de resserrer l'étau autour des immigrés clandestins en les renvoyant dans leurs pays d'origine, et décourager ceux qui auraient l'intention de s'installer en France. Il faut rappeler que sur près de 15.000 reconduites à la frontière mises à exécution au premier trimestre 2009, plus de 1500 ont concerné des Algériens. «L'UMP a trouvé un nouveau bouc émissaire, les étrangers en situation irrégulière», a fait remarquer le député socialiste Jean Mallot. Ils seraient plus de 200.000 à bénéficier de l'aide médicale de l'Etat, sans cette couverture sociale à caractère hautement humanitaire et sans revenus, les sans-papiers n'auront qu'à se cacher pour...mourir.