L'eau du barrage de Tichy Haff n'est pas en odeur de sainteté auprès des Béjaouis. Ce qui devait être une délivrance, pour au moins une partie des habitants de la wilaya de Béjaïa, est devenu depuis quelques mois un calvaire. Il s'agit bien sûr de l'eau du barrage Tichy Haff, tant attendue. Elle a coulé certes, dans leurs robinets depuis le mois de juillet, mais force est de constater qu'à ce jour, elle n'est pas consommée. Les habitants de la ville de Béjaïa, alimentés à partir de ce barrage, doutent toujours de la qualité de son eau. En dépit des assurances fournies par l'organisme distributeur, en l'occurrence l'Algérienne des eaux (ADE), les citoyens n'ont recours à cette eau que pour la lessive, la vaisselle et autres travaux ménagers. Mais depuis quelques jours, cette eau n'est livrée que pendant quelques heures dans certains quartiers d'Ihaddaden. De plus, le jour de l'Aïd, l'eau n'avait coulé que pendant une heure à Ihaddaden Oufella, pour ne citer que ce quartier. Non seulement la qualité de l'eau du barrage Tichy Haff est «douteuse», mais elle se fait présentement rare. Ce qui fait l'affaire des vendeurs d'eau minérale et depuis quelques mois, des autres «affairistes», qui se sont inventé depuis, un nouveau métier corollaire de la distribution de l'eau. En effet, une nouvelle activité informelle est apparue ces derniers mois. Des camions-citernes sillonnent les quartiers concernés par la demande en eau potable leur proposant une eau dite «de source». Sans aucune autorisation ni un quelconque document attestant de la qualité de l'eau proposée, ils parcourent du matin au soir les différents quartiers. A raison de 10 dinars les 5 litres d'eau, les habitants des quartiers alimentés à partir du barrage de Tichy Haff leur font appel sans réfléchir. Comparée à l'eau de leur robinet en termes de qualité et aux eaux minérales sur le plan du prix, l'eau des citernes est une «bonne affaire». Une affaire assez rentable tant pour les habitants, que pour les revendeurs. En fait, ces derniers s'approvisionnent à partir des sources de Toudja. C'est ce qu'ils disent, du moins, à leurs clients. Le barrage de Tichy Haff est totalement achevé et sa mise en eau a eu lieu depuis deux ans. Il représente pour la wilaya de Béjaïa, l'un des plus importants projets relancés dans le cadre du programme du président de la République. Ce barrage, qui a d'abord connu un grand retard faute de financement, a été pour l'essentiel réactivé ces dernières années. Il ne reste plus que l'achèvement de la conduite d'AEP qui va étancher la soif de la moitié de la population de Béjaïa, soit 22 communes au total. Ces agglomérations sont pour la plupart situées sur les deux rives de l'oued Soummam. D'une capacité de 80 millions de m3, ce barrage est actuellement rempli à 80%, selon les services de l'hydraulique de la wilaya. Son eau ne sera pas consacrée uniquement à l'usage domestique, mais elle servira aussi à l'industrie et à l'irrigation des terres agricoles situées dans la même région. Selon les responsables de l'hydraulique, la qualité de l'eau de ce barrage s'améliorera au fur et à mesure. Quant à l'arrière-goût qu'elle présente, il disparaîtra avec le temps. Ce constat a été confirmé par les habitants qui restent encore sceptiques quant à la consommation de cette eau. Des analyses sont régulièrement effectuées, a priori elles se sont avérées négatives en matière de risques pour la santé publique. Seul le temps finira par confirmer l'appréciation des résultats d'analyses. L'eau du barrage sera totalement renouvelée et l'arrière-goût disparaîtra de fait. Il suffit tout juste d'être patients.