Ces manifestations étaient censées accueillir le général de Gaulle, arrivé en Algérie deux jours avant, pour promouvoir son projet d'autodétermination. Les manifestations du 11 décembre 1960 ont été, après 6 ans de guerre, la proclamation «solennelle» de l'Indépendance de l'Algérie, a relevé Larbi Alilat, membre du réseau d'Alger lors de ces manifestations à Belcourt, actuellement Mohamed-Belouizdad. «Si le 1er Novembre 1954 a été le déclenchement de la guerre de Libération, le 11 décembre 1960 la proclamation solennelle de l'indépendance de l'Algérie», a souligné dans un entretien à l'APS, Larbi Alilat, un des membres du réseau «El Malik» qui avait infiltré les manifestations après une réunion tenue à Belcourt la nuit du 11 décembre 1960. «Le monde entier a su, ce jour du 11 décembre 1960, qu'il n'y aura plus de concessions. Le peuple algérien n'acceptait plus aucune autre solution que l'indépendance totale», a-t-il dit. «Ces manifestations étaient censées accueillir le général De Gaulle, arrivé en Algérie deux jours avant pour promouvoir, auprès du peuple algérien, son projet controversé d'élections libres pour une autodétermination», a tenu à rappeler M.Alilat, qui était également responsable dans la Wilaya III puis dans la Wilaya IV historiques. M.Alilat a affirmé que c'est le Mouvement pour la communauté (MPC), allié de De Gaulle, qui a initié les manifestations et que le FLN n'a fait que les récupérer par la suite. Pour M.Alilat, le Gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra), basé à Tunis, appelait les Algériens à ne pas s'en mêler, au début des manifestations, puisqu'il s'agissait d'une affaire franco-française. «Partout où De Gaule passait, la tension montait entre les ultras, qui rejetaient le projet de -l'Algérie algérienne de De Gaulle- et les gaullistes qui le soutenaient», a-t-il ajouté. «Les manifestations du 10 décembre 1960 à Belcourt étaient tellement impressionnantes, notamment après l'incendie de l'immeuble Nizière, que notre groupe, au cours d'une réunion informelle, à la rue de la Liberté, pas loin des Halles, décida d'empêcher une victoire à 100% gaulliste», a-t-il témoigné. «Ce sont Bettouche Belkacem et son adjoint Benslimane Youcef, tous deux enfants d'Alger et anciens de la 1re bataille d'Alger, qui se chargèrent de transmettre aux militants l'instruction de lancer des slogans dictés par le FLN, tels que -Vive le GPRA-, -Vive Ferhat Abbas-, -Vive le FLN-», a-t-il ajouté. «Nous avions eu tellement peur que De Gaulle réussisse son projet, que nous n'avions pas pu rester les bras croisés», a-t-il indiqué. Dans une conférence de presse le 12 décembre 1960 à Tunis, le président du Gpra, M. Ferhat Abbas, avait déclaré, rappelle-t-on, que «dans le but de tromper l'opinion internationale, le gouvernement français a voulu, de toute évidence, faire plébisciter sa politique dans notre pays». «L'armée et l'administration colonialiste qui ont laissé se développer les manifestations et les provocations des ultras ont tenté de susciter, par ailleurs chez les Algériens, des mouvements en faveur des statuts», avait-il dit, soulignant que le peuple algérien «avance à grands pas vers la liberté». De son côté, Abdelhamid Mehri, membre du Gpra, sollicité en marge du colloque international sur Enrico Mattei et la guerre de Libération, a souligné qu'il ne faut pas percevoir la mobilisation du peuple algérien, le 11 décembre 1960, comme une action isolée mais comme «une concrétisation d'une stratégie de la Révolution qui a allié tous les moyens de lutte depuis la déclaration de la guerre jusqu'à la victoire». Pour M.Mehri, «ces manifestations ont été préparées psychologiquement ou politiquement». Le résultat des événements, quel que soit leur initiateur, a été «splendide», a-t-il soutenu. «La voix de l'Algérie algérienne et indépendante s'est fait entendre dans le monde entier de par la présence des journalistes des quatre coins de la planète pour couvrir la visite du président français; Charles de Gaulle», a-t-il ajouté.