Près de 200 pays rassemblés à Cancun (Mexique) sous l'égide de l'ONU ont adopté, hier, une série de mesures pour lutter contre le changement climatique, un accord accueilli par une ovation debout qui tourne la page de l'immense déception de Copenhague, il y a un an. Le texte prévoit la création d'un Fonds vert pour aider les pays en développement à faire face au réchauffement et lance un mécanisme pour lutter contre la déforestation. L'objectif de ce rendez-vous mexicain - aux ambitions modestes - était d'abord de redonner souffle au processus de négociation onusien, fortement ébranlé par l'immense déception née du sommet de Copenhague. Mission accomplie, selon les délégations réunis en plénière pour adopter le texte. Avec cet accord, «on sauve de la faillite le système multilatéral de négociations sur le changement climatique», a déclaré la ministre française de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. Le texte adopté à l'issue de 12 journées de négociations intenses et parfois tendues, «ouvre une nouvelle ère pour la coopération internationale sur le climat», a assuré la ministre mexicaine des Affaires étrangères, Patricia Espinosa, qui présidait les débats. Quelques heures plus tôt, le texte de compromis mis sur la table par le Mexique avait reçu, au cours d'une séance plénière chargée d'émotion, le soutien très appuyé de l'écrasante majorité des 194 pays de la convention de l'ONU sur le climat. La principale vertu du texte, adopté en dépit de l'opposition de la Bolivie, est d'inscrire dans le marbre de nombreux points de l'accord politique de Copenhague, qui n'a jamais été adopté par la convention de l'ONU. Et de le décliner de façon plus précise et concrète. C'est en particulier le cas de l'objectif de limiter la hausse de la température moyenne de la planète à 2°C au-dessus des niveaux pré-industriels. «Les parties doivent agir de manière urgente pour atteindre cet objectif à long terme», indique l'accord adopté. Le texte permet aussi de désamorcer, au moins temporairement, à la faveur d'une formule ambiguë, la «bombe» de l'avenir du protocole de Kyoto, seul traité juridiquement contraignant sur le climat existant à ce jour qui menaçait l'issue des discussions à Cancun. Les pays développés ont promis à Copenhague de mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020. Le Fonds vert, qui verra transiter une partie importante de ces fonds, aura un conseil d'administration avec représentation équitable entre pays développés et en développement. Le texte de Cancun prévoit que la Banque mondiale servira d'administrateur intérimaire durant trois ans. Les nombreuses interrogations sur la façon dont ce fonds sera alimenté restent cependant sans réponse. Un panel mis en place par l'ONU a suggéré la mise en place de financements alternatifs, comme des taxes sur les transports et les transactions financières. Le texte pose, par ailleurs, les bases d'un mécanisme visant à réduire la déforestation à l'origine d'environ de 15% à 20% des émissions globales de GES. Bangladesh, Guyane, Zambie, Suisse, Brésil, Etats-Unis, Algérie, Union européenne, Chine, Maldives... les uns après les autres, les délégués ont pris la parole dans la nuit de vendredi à samedi pour dire oui, avec force, à ce texte. «L'Union européenne est venue à Cancun avec l'espoir d'arriver à un paquet (de décisions) équilibré», a déclaré la commissaire européenne au Climat, Connie Hedegaard. «Nous y sommes parvenus!». «L'accord donne un nouveau souffle aux négociations», s'est félicité Jeremy Hobbs, directeur exécutif d'Oxfam International, tout en appelant, comme nombre d'autres ONG, à travailler «en urgence» pour rendre plus ambitieux les engagements de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. S'il ébauche une architecture sur nombre de dossiers, le texte de Cancun n'apporte aucune nouveauté sur le niveau de réductions des émissions, jugé unanimement trop faible pour atteindre l'objectif des deux degrés.