Au moins une vingtaine de femmes ont été blessées par des éléments incontrôlés habillés en policiers. La Tunisie ne décolère pas. La révolte gagne les prisons. Au moins 42 détenus ont péri hier, dans l'incendie d'une prison de Monastir, dans le centre-est de la Tunisie. «Trente et un corps ont été transportés à la morgue et onze ont suivi», a déclaré le Dr Ali Chatli, chef du service de médecine légale à l'hôpital Fatouma-Bourguiba de Monastir (160 km au sud de Tunis). C'est l'incident le plus meurtrier depuis le début des émeutes qui ont conduit à la fuite, vendredi, de l'ancien chef de l'Etat Zine El Abidine Ben Ali. Ce bilan est appelé à s'alourdir vu l'intensité de l'incendie. Ce médecin témoigne que le sinistre s'est déclaré lorsqu'un détenu a mis le feu à un matelas dans un dortoir hébergeant près de 90 détenus lors d'une tentative d'évasion qui a tourné à la panique en raison de coups de feu tirés près de la prison. Il a précisé que toutes les victimes du premier groupe ont été identifiées et ont été transportées à l'hôpital avant l'aube, et que les 11 autres venaient d'arriver. «Les corps sont arrivés carbonisés mais on a pu les identifier», a-t-il précisé en soulignant que les victimes sont mortes de suffocation et de brûlures graves. Plusieurs blessés ont été également signalés au niveau de la même région. Au moins une vingtaine de femmes ont été blessées par des éléments incontrôlés habillés en policiers, qui se sont emparés d'armes dans la ville voisine de Msaken avant de répandre la rumeur sur une fausse libération de prisonniers. Des familles de détenus se sont rendues, selon des témoins, à la prison et c'est alors qu'elles ont essuyé des tirs ayant provoqué la panique et la confusion. Les blessés ont été transportés à l'hôpital Sahloul de Sousse. A Mahdia, plus au sud, une attaque de la prison a fait trois blessés, selon le directeur de l'hôpital de la ville, Radhouane Harbi, qui a évoqué la possibilité de morts à l'intérieur du centre de détention. A l'ouest de Tunis, des tentatives d'attaque ont été signalées par des témoins contre la prison de Mornaguia, et le plus grand centre pénitentiaire du pays, celui de Fejja. Des hélicoptères de l'armée survolaient ces deux localités en mettant la population en garde contre le risque de «balles perdues» des assaillants. A Kasserine, dans le centre-ouest, un syndicaliste, Sadok Mahmoudi, a signalé une tentative d'attaque contre la prison de la ville évoquant toutefois, la possibilité d'une implication d'habitants cherchant à libérer des proches. Il faut reconnaître que la colère de la rue gagne toutes les institutions. Depuis son éclatement il y a un mois, le mouvement ne cesse d'élargir ses rangs. Des avocats, des travailleurs et différents représentants de la société civile y ont adhéré pour exprimer leur ras-le-bol de 23 ans de règne de l'ex-président Ben Ali.