Les autorités françaises ont demandé à Alger de ne plus recevoir l'ancien chef de la DST, Yves Bonnet. Paris souligne dans un message que seuls les membres du gouvernement français ou des collaborateur de Chirac sont habilités à traiter avec les autorités algériennes. Yves Bonnet a trouvé en Algérie un terrain juteux dans les milieux d'affaires accusés d'avoir trompé dans les derniers événements qu'a connus le pays. En ces temps de cohabitation, la France est irrémédiablement divisée sur le traitement du «dossier Algérie». Alors que Chirac soutient: «Notre interlocuteur en Algérie pour de longues années, sera Bouteflika », son ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine, multiplie les prises de position hostiles à l'Algérie. Entre les deux, opère une organisation franco-algérienne aux contours imprécis, conduite par l'ancien parton de la DST, qui tire profit de la situation. Yves Bonnet est au centre de ce qu'on appelle communément la mafia bleue révèlent des sources bien introduites dans les arcanes des coulisses de la politique française. Cet ancien responsable de la DST serait impliqué, depuis les années 80, à en croire ces mêmes sources, dans des affaires douteuses en relation avec des milieux maffieux incrustés dans le système algérien. C'est ainsi que pendant des années, Bonnet aurait tissé un véritable réseau influent aussi bien en Algérie qu'en France et qui se pose en lobby des deux côtés de la Méditerranée au service d'une caste d'affairistes français et algériens, ajoutent nos sources. Très bien implantés dans les rouages des institutions des deux pays, les hommes de l'ancien chef de la DST font et défont les alliances politiques entre l'Algérie et la France au gré de leurs intérêts propres, assure-t-on. Aussi, la popularité de l'espion-homme-d'affaires en Algérie, présenté comme un grand ami par certains, s'explique amplement et n'est d'ailleurs pas pour le gêner, lui qui a très fortement souligné son franc soutien à l'Algérie entre 1992 et 1999. En cette période trouble où les cartes étaient encore en distribution au sommet de la pyramide algérienne, de grosses affaires juteuses dont on saura, un jour ou l'autre, la teneur, se contractaient. Premier bénéficiaire de la situation de ni guerre ni paix qui prévalait en Algérie, la mafia bleue s'employait à entretenir un climat délétère dans les relations algéro-françaises. Nos sources affirment que l'affaire d'Air France n'est pas étrangère au groupe de pression où Yves Bonnet tient un rôle clé. En effet, l'homme qui est derrière le refus de la compagnie aérienne de revenir à Alger sous le prétexte sécuritaire, qui répond au nom de Catala et qui occupe le poste de responsable de la sécurité d'Air France, serait un proche d'Yves Bonnet. La persistance de cet important point de discorde entre l'Algérie et la France joue en faveur de la mafia bleue qui instrumentalise à merveille la hargne des socialistes français envers l'Algérie, précisent nos sources. Ces dernières insistent sur le fait que les intérêts politiques de l'Internationale socialiste vis-à-vis d'Alger font les affaires de cette même mafia bleue, dont les membres, en apportant la contradiction à l'IS, se rapprochent du pouvoir algérien et se posent par conséquent en amis, - une denrée assez rare dans la période d'isolement que traversait le pays durant les années 90. L'arrivée de Bouteflika à la tête de la République a été saluée par le même Yves Bonnet qui a «ostensiblement» affiché sa satisfaction et appelé l'Etat français à collaborer avec le locataire du palais d'El-Mouradia. L'«éternel ami de l'Algérie» multipliait les déclarations positives sur l'Algérie sans que rien de sérieux ait été entrepris dans le sens du raffermissement des relations entre les deux pays, notamment la question d'Air France où il aurait pu jouer un rôle déterminant. En fait, et nos sources le confirment, l'ancien chef de la DST n'a eu aucun geste réellement constructif en direction d'Alger, pour la simple raison que l'objectif recherché était de maintenir l'Algérie en retard sur les plans économique et administratif. Le petit jeu d'Yves Bonnet aurait pu durer longtemps, n'était la volonté politique d'Alger de moraliser, autant que faire se peut, la vie économique nationale. La transparence dans la passation de grands marchés publics et les nombreux mouvements dans les différents corps de l'Etat ont désarçonné l'organisation mise en place de ce côté de la Méditerranée qui, révèlent nos sources, a beaucoup perdu dans l'affaire. Les masques sont tombés à l'annonce du plan de relance économique qui, de par la manière de sa répartition, prive la mafia bleue d'une manne inespérée. Le revirement, attendu d'ailleurs, par les connaisseurs, de Bonnet vis-à-vis de Bouteflika serait motivé par la fermeture du robinet de la rente décidée par le Président de la République en sus de l'affaiblissement en Algérie de l'organisation mafieuse. Cependant, cette même organisation, qui figure en filigrane dans le rapport de la Commission parlementaire sur les événements de Kabylie, n'hésite pas à jouer toutes les cartes en sa possession pour obtenir le départ du chef de l'Etat pour se réapproprier les leviers de la décision économique et, partant, se reconstituer de nouveau. Yves Bonnet, de son côté, empêtré dans un scandale de vente d'armes en Afrique, donne son coup de main à partir de l'Hexagone, en décrétant l'échec de la politique de Bouteflika et en souhaitant implicitement son départ. Le Président de la République, qui maintient l'hypothèse d'une ingérence d'une main française dans ce qui se passe dans le pays, tout en écartant la France officielle, sait sans doute de quoi il parle. En tout cas, à la lumière des révélations faites à L'Expression sur les agissements de la mafia bleue, le puzzle se reconstitue peu à peu. A l'heure actuelle, plusieurs intervenants sont identifiés par les observateurs dans la crise que traverse l'Algérie. Outre l'Internationale socialiste et des corrompus du système, la mafia bleue est sans conteste un acteur majeur dans la persistance du flou autour des événements qui secouent le pays