Le «processus de la militarisation de la vie politique en Egypte», mis sur pied par le régime demeure une logique avérée. A la veille d'une marche géante décidée par l'opposition, après 7 jours de manifestations sans précédent, contre le régime, Hosni Moubarak a, sous la pression de la rue égyptienne et des capitales occidentales, annoncé la nouvelle équipe constituant son nouveau gouvernement. Gardant une bonne partie des portefeuilles clés du régime, à l'exception notable de celui de l'Intérieur Habib el-Adli, dont les manifestants réclamaient le départ, le «Pharaon» reconduit ainsi le ministre des Affaires étrangères Ahmed Aboul Gheit, de la Défense, le général Mohamed Hussein Tantaoui, de l'Information, Anas el-Fekki et celui du Pétrole. Et au chapitre des changements opérés, Hosni Moubarak a nommé un nouveau ministre de l'Intérieur, le général Mourad Mowafi, des services de renseignements, en remplaçant de l'influent Omar Souleimane, promu, samedi dernier, au titre de vice-président, vacant depuis 30 ans. Moubarak avait, pour rappel, annoncé, samedi dernier, la nomination d'un nouveau Premier ministre, issu de l'armée, le général Ahmad Chafic, ancien ministre de l'Aviation. C'est dire que le régime de Moubarak, qui tire sa force de l'appareil militaire, a remis en place, à travers ces présents changements, un gouvernement de militaires. Hosni Moubarak maintient, à l'évidence, son tour de vis. Et en dépit de la démocratisation de la vie politique et institutionnelle, tant réclamées par le «volcan égyptien» qui s'est réveillé depuis une semaine, le «processus de la militarisation de la vie politique en Egypte» mis sur pied par le régime demeure une logique avérée, que les tenants du «temple» de Moubarak ont mis sur pied, depuis 1981. Du coup, le changement de gouvernement, opéré par Hosni Moubarak, survient, il est utile de le souligner, à la veille d'une marche géante prévue au Caire à l'appel des manifestants, qui réclament, sans relâche et sans détour, le départ indiscutable de Hosni Moubarak, 83 ans, au pouvoir depuis trois décennies. De leur côté, l'opposition et les manifestants, regroupés autours de Mohammed El Baradei, prix Nobel de la paix, ne se sentent pas concernés par la formation du nouveau gouvernement. Son seul et unique souci est, sans aucun doute, de déloger Hosni Moubarak qui s'entête et s'accroche mordicus à la tête de l'Egypte. D'autant plus que l'appel lancé par le mouvement de contestation à la grève générale, hier, et à une «marche d'un million» de personnes pour aujourd'hui, vient de confirmer, une fois de plus, la détermination des Egyptiens à en finir avec l'ère Hosni Moubarak. A ce sujet, il faut dire qu'une marée humaine a de nouveau déferlé sur la place Tahrir (place de la Libération), épicentre de la contestation dans le centre du Caire depuis le 25 janvier. Les manifestants, bravant le couvre-feu imposé depuis jeudi dernier, soutiennent qu'ils resteront sur les lieux pour prendre part à la marche d'aujourd'hui. «Nous resterons sur cette place, jusqu'à ce que le lâche parte», scandaient les manifestants, à propos de Hosni Moubarak. Après les affrontements dans de nombreux endroits à travers l'Egypte ayant fait au moins 125 morts et des milliers de blessés, le centre du Caire n'a pas désempli. Les manifestants comptent sur le bouche-à-oreille pour diffuser leur appel à la marche pour faire tomber Hosni Moubarak. Signalons enfin que certains manifestants ont passé la nuit malgré le couvre-feu en vigueur dans la capitale, à Suez et à Alexandrie.