Sept manifestants ont été tués lors de heurts avec la police en Irak, où des milliers de protestataires se sont rassemblés, surtout à Baghdad, pour une «Journée de la colère» contre l'impéritie du gouvernement malgré les restrictions et les mises en garde officielles. Les Irakiens ont été forcés de marcher jusqu'à la place Tahrir, dans le centre de Baghdad, le commandement militaire de Baghdad ayant interdit toute circulation automobile jusqu'à nouvel ordre. Au milieu d'un important déploiement militaire et policier, quelque 5000 manifestants étaient rassemblées sur la place, alors que d'autres protestataires affluaient. Des restrictions ont également été imposées sur les manifestations à travers le pays. Alors que les protestations étaient pacifiques dans la capitale, des affrontements ont éclaté entre forces de sécurité et manifestants lors de rassemblements à Hawija, au nord de Baghdad, et à Mossoul (nord) dans lesquels sept manifestants ont été tués, selon la police. Ces décès portent à onze le nombre de manifestants tués dans le cadre du mouvement de contestation qui agite l'Irak depuis plusieurs semaines. Un policier y a également été tué. S'inspirant des révoltes en Tunisie et en Egypte, un mouvement dénommé «la Révolution de la colère irakienne» a appelé via Facebook à manifester pour exiger «le changement, la liberté et une démocratie véritable», en demandant aux forces de sécurité de «protéger» les manifestants. Il a appelé «les millions de chômeurs, les intellectuels, les travailleurs, les diplômés des universités, les veuves et les orphelins» à se rassembler sur la place Tahrir. Cependant la majorité des organisateurs des manifestations insistent sur leurs seules revendications de «réformes» et d'amélioration du quotidien des citoyens. «Il ne s'agit pas de faire tomber le gouvernement ou le régime, ni de prendre des hommes politiques pour cible», soulignent-ils dans un communiqué. «Nous ne voulons pas changer le gouvernement, car nous l'avons élu, mais nous voulons qu'il se mette au travail», a déclaré Darghan Adnane, un étudiant de 24 ans manifestant place Tahrir. «Les gens viennent à pied jusqu'à la place», a affirmé l'une des organisatrices, Chourouq al-Abayachi. «L'annonce tardive de l'interdiction de la circulation automobile vise bien sûr à tenter d'empêcher les gens de venir». Jeudi, le Premier ministre Nouri al-Maliki a accusé les organisateurs de la manifestation d'être des partisans de l'ancien dictateur Saddam Hussein, des «terroristes», appelant «dans un souci de contrecarrer les plans des ennemis» à ne pas participer spécifiquement à cette manifestation. «Aucun de nous n'appartient à Al Qaîda ni aux partisans de Saddam, nous sommes des citoyens irakiens ordinaires qui protestons contre l'absence de services publics, la corruption et nous voulons la réforme du système», a rétorqué Mme Abayachi. Dans le Sud, quelque 3000 personnes ont manifesté à Bassora après l'annonce de la démission du gouverneur de la province, alors que dans les villes de Nassiriya (sud), Kout et Kerbala (centre), des centaines de personnes ont crié: «Menteur, menteur Maliki». Pour tenter de calmer la grogne, le gouvernement a récemment multiplié les gestes, augmentant notamment d'un milliard de dollars le montant, alloué aux rations alimentaires distribuées à six millions de familles, en contraignant les officiels à se serrer la ceinture. Près de sept millions d'Irakiens (23% de la population), vivent sous le seuil de pauvreté avec 2,2 dollars par personne et par jour et 30% des jeunes sont au chômage.