Qamaredinne Kherbane vient d'être appréhendé au Maroc, par les autorités de ce pays. Le FBI avait, déjà, ce proche d'Oussama Ben Laden, dans le collimateur. Exilé à Londres depuis 1995 où il a réussi à obtenir un statut de réfugié politique, Kherbane était en déplacement privé au Maroc afin de rendre visite à Saïd Hamaz, un terroriste du GIA détenu dans la prison de Casablanca depuis 1994 pour transport frauduleux d'armes en direction de l'Algérie. Kherbane a été interpellé dans des conditions non encore élucidées dans le cadre des mesures de prévention antiterroristes prises par le Maroc et de nombreux pays occidentaux et arabes suite à l'attentat-suicide du 11 septembre dernier contre les Etats-Unis. Qamaredinne Kherbane est une vieille connaissance des services des renseignements internationaux, dont les Algériens qui ont accumulé des tonnes de preuves sur son implication dans des affaires terroristes, puisqu'il est considéré, par les spécialistes, comme un homme-lige de Ben Laden qu'il a rencontré récemment, en 1998, à Peshawar, la ville frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan. C'est à partir du territoire des taliban que Kherbane a acquis une réputation mondiale au sein de l'internationale islamiste. Sous la coupe de Bounouia Boudjemia, plus connu sous le pseudonyme d'Abou Anas, Kherbane avait été à l'origine de la création de «Maktab al khadamat», le bureau des services des afghans arabes (comme rapportée déjà par L'Expression dans son édition d'hier). Kherbane était déjà connu au sein des milieux islamistes algériens puisqu'il était l'un des membres fondateurs du FIS dissous et l'un des organisateurs du recrutement des futurs afghans en Algérie. Exclu des assises du FIS dissous lors du congrès de Batna, il quitte, début 92, Alger pour Paris grâce à des complicités islamistes installées au Maroc. La même filière qu'empruntent Kébir, Heddam ou les autres dirigeants islamistes à l'étranger. Il créera, dès son arrivée en France, l'organisation «Al bakoun âla ahd», avec l'aide d'Abou Anas, mais également des deux fils de Abassi Madani qui se veut fidèle au serment du FIS originel. Arrêté par les services français qui l'expulsent vers un pays de son choix, Kherbane choisira logiquement le Pakistan où il possède une maison et où, son bureau de liaison fonctionne toujours. C'est depuis Peshawar qu'il supervise le renvoi des «afghans algériens» vers les maquis du GIA et contribue à former des commandos islamistes dont le premier se signalera lors de l'attaque contre une caserne de l'ANP à Guemmar, à El-Oued, dirigée par un certain Tayeb Al Afghani, ancien disciple de son ami Abou Anas. Disposant de visas réguliers, Kherbane se déplace à travers de nombreux pays arabes dont le Yémen, puis le Soudan où on le verra, plusieurs fois, en compagnie du dirigeant de la LNF soudanaise de Hassen El-Tourabi. Il participe d'ailleurs à un congrès de l'internationale islamiste à Khartoum en 1993, puis en 1994 avec Heddam où il tisse des contacts avec les pasdarans iraniens. Les services de renseignements occidentaux retrouvent sa trace en Croatie, puis en Bosnie où il dirige le transit vers les zones de combat des milices islamiques internationales créées pour venir en aide au régime de Sarajevo. Il fera ainsi venir plusieurs centaines de combattants islamistes depuis l'Afghanistan dont des Algériens qui, via l'Italie et la France, arriveront à retourner en Algérie. En 1995, Kherbane se consacre à la politique, depuis Londres, et veut court-circuiter Rabah Kébir - son ennemi juré - de la présidence de la direction extérieure du FIS à l'étranger. Fort de son amitié avec les fils Madani, Kherbane n'arrive pas à suppléer Kébir et crée une organisation parallèle avec Heddam qui critiquera toute approche de dialogue avec le pouvoir algérien. Kébir l'accusera d'avoir utilisé une partie des fonds de l'ancien parti islamiste en Europe, estimée à 44 millions de dollars, à armer et à équiper les «afghans algériens» qui venaient apporter leur expérience dans le meurtre en territoire algérien. Opposée à toute option favorable à la concorde civile, Kherbane poursuivra son inlassable travail de recrutement et d'envoi de terroristes vers l'Algérie. Il abandonne le GIA au profit du Gspc d'Abou Hamza (Hassan Hattab) et conseille Ben Laden pour qu'il intègre l'organisation salafiste dans son organisation el Qaîda, ce qui sera fait en 1998. Arrêté par la police marocaine, Kherbane devra répondre de ses contacts soutenus avec le terroriste le plus recherché au monde et plus tard, espèrent les Algériens, de tout son apport au terrorisme en Algérie.