Le calme continuait à régner hier à Abidjan, coupé, cependant, de tirs sporadiques dans les quartiers périphériques alors que les deux camps antagonistes se renvoient la responsibilté des tueries de Duékoué. Le secrétaire général adjoint de l'ONU chargé des droits de l'homme, Ivan Simonovic, est depuis dimanche à Abidjan pour «évaluer la situation générale» après le massacre dans l'ouest de la Côte d'Ivoire de plusieurs centaines de personnes, dont sont notamment accusées les troupes pro-Ouattara. Comme dimanche, seuls quelques tirs sporadiques d'arme lourde étaient entendus hier matin A Abidjan, théâtre de combats et de pillages depuis jeudi soir. Dans le quartier du Plateau (centre) où se trouve le palais présidentiel, quelques tirs étaient entendus au loin. Des jeunes femmes et enfants se hasardaient dans les rues désertes pour aller chercher de l'eau, plusieurs secteurs subissant des coupures. Par ailleurs, Le regroupement des Français en Côte d'Ivoire était en cours hier dans trois lieux de la capitale économique Abidjan, livrée au chaos, alors que le camp d'Alassane Ouattara promet une «offensive rapide» pour réduire les bastions de Laurent Gbagbo dans la métropole ivoirienne.» Hier, le ministère n'a pas donné d'indications sur le nombre de Français déjà regroupés sur les trois lieux désignés par l'ambassade de France. La décision de ce regroupement a été prise dimanche par les autorités françaises qui ne parlent pas jusqu'à présent d'opération d'évacuation. Le Quai d'Orsay évalue à 12.200 le nombre de Français actuellement en Côte d'Ivoire, dont 11.800 à Abidjan. Quelque 7300 ont la double nationalité. La France a envoyé hier 150 soldats supplémentaires pour protéger les expatriés à Abidjan, ce qui porte l'effectif de la force Licorne à environ 1650 hommes, a annoncé à Paris l'état-major des armées. Ces regroupements débutent au moment où Guillaume Soro, Premier ministre de M.Ouattara, président reconnu par la communauté internationale, annonce que la situation est «désormais mûre» pour une offensive «rapide». «La stratégie était d'encercler la ville d'Abidjan. Nous avons envoyé des soldats à l'intérieur de la ville pour faire du harcèlement des troupes pro-Gbagbo, des miliciens et mercenaires», a-t-il indiqué dimanche soir sur la télévision du camp Ouattara, la TCI. Repliées sur leurs derniers bastions, les troupes du président sortant Laurent Gbagbo opposent une résistance farouche, disposant notamment de véhicules blindés et d'artillerie lourde. M.Gbagbo qui refuse toujours de démissionner ou de s'exiler, a marqué un point dimanche. Le chef d'état-major de son armée, le général Philippe Mangou, a quitté la résidence de l'ambassadrice sud-africaine à Abidjan où il s'était réfugié mercredi avec sa famille. Le général dont la défection avait frappé les esprits, a ensuite rencontré M.Gbagbo à sa résidence. Le camp Ouattara n'a pas tardé à dénoncer «chantage et pressions» sur le haut gradé. Sur la question des violations des droits de l'homme, la région très troublée de l'Ouest suscitait toujours de grandes inquiétudes. A son arrivée dimanche, le secrétaire général adjoint de l'ONU «a exprimé sa vive préoccupation par rapport à la détérioration de la situation des droits de l'homme entachée de massacres à l'Ouest et de nombreuses exactions contre les populations civiles». Selon l'ONU et plusieurs organisations internationales, la prise mardi 29 mars par les combattants d'Alassane Ouattara de Duékoué, important carrefour de l'Ouest ivoirien, s'est accompagnée de massacres à grande échelle, les bilans allant de 330 tués à un millier de «morts ou disparus». Selon l'ONU, «la plupart» des 330 morts de Duékoué ont été victimes de combattants de M.Ouattara, les autres essentiellement de miliciens et mercenaires libériens pro-Gbagbo. Le camp Ouattara a vivement contesté ces «allégations», affirmant que tous les tués étaient des «miliciens». Les Forces républicaines de M.Ouattara ont annoncé avoir «compté» 152 corps à Duékoué et non des centaines.