Les ministres des Affaires étrangères des monarchies du Golfe tentaient hier à Riyadh de relancer leur plan de sortie de crise au Yémen, où un large mouvement de protestation réclame depuis plus de deux mois et demi le départ du président Ali Abdallah Saleh. Une délégation de l'opposition parlementaire yéménite, qui était attendue dans l'après-midi d'hier dans la capitale saoudienne, espère obtenir des ministres des précisions sur ce que leur médiation prévoit quant au départ de M.Saleh, au pouvoir depuis 32 ans. «Nous allons rencontrer les ministres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) à Riyadh pour demander des précisions sur leur initiative, et en premier lieu sur le départ du président Saleh», a déclaré Yassine Saïd Noomane, chef du Forum commun, une coalition de l'opposition parlementaire. Les ministres devraient passer en revue «ce qui a été convenu» lors de leurs précédentes réunions les 3 et 10 avril «au sujet des contacts à mener avec le gouvernement et l'opposition yéménites dans le cadre de leur initiative» pour une transition pacifique du pouvoir au Yémen, selon un communiqué du CCG. Le Forum commun fait du départ de M.Saleh -principale revendication du mouvement de protestation sans précédent entamé fin janvier dans la foulée des révoltes populaires qui secouent le monde arabe - un préalable à tout règlement politique, alors que la dernière proposition du CCG prévoit que le président Saleh procède à un simple transfert de ses prérogatives au vice-président. M.Saleh, qui a perdu le soutien d'une partie de l'armée, de tribus puissantes et de dignitaires religieux, se dit prêt à un «transfert pacifique du pouvoir mais dans le cadre de la Constitution». Il n'a montré aucun signe d'un éventuel départ rapide. Vendredi, il a répété qu'il représentait «la légitimité constitutionnelle», dans un discours devant des dizaines de milliers de ses partisans à Sanaa. Pour tenter de rapprocher les deux parties, des diplomates américains et européens ont eu des contacts avec le Forum commun ces derniers jours à Sanaa, selon un diplomate occidental qui a requis l'anonymat. «Le Forum commun a obtenu des assurances américaine et européenne sur le succès de l'initiative du CCG, notamment par un départ rapide du président Saleh», a expliqué le diplomate. Les Etats-Unis, qui redoutent le chaos au Yémen où le réseau Al Qaîda est très actif, ont apporté leur soutien à la médiation du CCG, estimant qu'un dialogue sur une transition politique était «nécessaire de toute urgence». «Le calendrier et la nature de cette transition devront être déterminés via la négociation», avait ajouté le département d'Etat. Mais l'opposition yéménite exclut pour le moment tout dialogue avec le régime et a menacé samedi de ne pas se rendre à Riyadh si un émissaire du gouvernement était présent dans la capitale saoudienne. «Nous irons à Riyadh à condition qu'il n'y ait aucune délégation ou représentant du gouvernement de Sanaa dans la capitale saoudienne pour ne pas donner l'impression qu'il y aura des négociations», a dit samedi Mohamed Salem Bassandaoua, qui conduit sa délégation des opposants yéménites à Riyadh. «Aucun représentant du gouvernement ne se rendra aujourd'hui à Riyadh», a affirmé une source proche du gouvernement. Sur le terrain, les protestataires yéménites devaient organiser hier de nouvelles manifestations, dont la répression a fait plus de 100 morts.