Les propos de M.Belkhadem ont fait réagir le vieux militant qui a émis des remarques dictées, selon lui, par la morale. L'actuel secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, se souviendra longtemps de cette intervention qu'il a faite à la Radio nationale et durant laquelle il aurait remis en cause la maturité politique du peuple algérien. Après Louisa Hanoune, qui lui a signifié que de pareils propos «sont une insulte à l'intelligence», hier, a été le tour de Salah Goudjil d'asséner certaines vérités à M.Belkhadem. «Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN, a commis ce qui peut être considéré comme un blasphème par rapport aux valeurs et aux principes du parti historique qu'il est censé diriger», a écrit M.Goudjil dans une déclaration transmise hier à notre rédaction. Lors d'une émission diffusée la semaine dernière par la Radio Chaîne III, Abdelaziz Belkhadem a estimé que l'hypothèse d'une évolution du système politique algérien vers le régime parlementaire, exige, au préalable, une culture démocratique dont le peuple algérien serait, à l'en croire, démuni. Le secrétaire général du FLN s'est interrogé dans la même émission si «l'électeur algérien votait pour un programme ou pour des personnes selon des considérations tribales ou régionales». Cette déclaration a fait réagir Salah Goudjil qui a émis dans sa déclaration plusieurs remarques dictées, selon lui, autant par la morale que par la raison. Aussi souligne-t-il en premier lieu que cette notion d'incapacité politique du peuple algérien «nous renvoie au leitmotiv de la politique coloniale qui a toujours défendu l'idée selon laquelle les Algériens, appelés d'ailleurs indigènes, étaient des citoyens de seconde zone». En second, M.Goudjil rappelle que le FLN a, expressément, signifié, dès la proclamation du 1er Novembre 1954 que le destin de l'Algérie était entre les mains non pas d'une élite, de quelque qualité qu'elle soit, mais de l'ensemble du peuple algérien. Toutes les étapes marquantes de la Révolution ont été le résultat, ainsi, de l'engagement lucide, conscient et résolu de tout le peuple algérien toutes composantes confondues, pas d'une catégorie particulière d'Algériens. «Ce n'est pas sans raison que le slogan de la Révolution algérienne, fut très justement, ‘'Par le peuple et pour le peuple''», a rappelé Salah Goudjil qui a trouvé «choquant que le FLN, le parti qui a conduit le pays à l'Indépendance nationale, en vienne, aujourd'hui, à proclamer que le peuple algérien n'est pas suffisamment conscient pour accéder à l'âge démocratique». Pour la troisième remarque relevée dans cette déclaration, elle tient à l'effort consenti par l'Etat pour l'élimination de l'analphabétisme au sein de la population, parallèlement à l'oeuvre gigantesque de démocratisation de l'enseignement entreprise depuis l'Indépendance. «Que ne se rappelle-t-il, M.Abdelaziz Belkhadem, que le combat contre l'analphabétisme est permanent, que des millions d'Algériens étudient chaque jour dans les établissements scolaires sans compter le un million deux cent mille étudiants dans les universités et les instituts», a tranché Salah Goudjil pour signifier à son collègue du parti qu'il s'agit là d'«une preuve éclatante du niveau d'instruction du peuple algérien, si tant est que cela est une condition pour l'accès à l'âge de la maturité politique». En quatrième lieu, M.Goudjil note que le peuple algérien, sous la direction du FLN, a toujours démontré une maturité exemplaire à chaque fois qu'il lui a été demandé de faire un choix fondamental. Il cite alors des exemples comme le référendum de juillet 1962, qui s'est soldé par le recouvrement de l'Indépendance nationale, les grandes discussions totalement libres et démocratiques organisées à deux reprises autour des grands axes de la Charte nationale et qui ont été marquées par l'extraordinaire degré de conscience politique des masses populaires. «A l'évidence, M.Abdelaziz Belkhadem qui a déjà ouvert la voie, au sein du FLN, aux détenteurs de fortune et autres responsables cooptés par effraction, veut-il scier l'arbre sur lequel le FLN repose», écrit l'ex-ministre des Transports, expliquant par ailleurs, que sa déclaration «n'est pas pour étonner ceux qui observent le cheminement insidieux de M.Abdelaziz Belkhadem à la tête du FLN». Il s'interroge ensuite: «Comment un dirigeant qui n'étant pas convaincu de la nécessité du fonctionnement démocratique des instances du parti fait élire les bureaux des mouhafadhate dans la clandestinité, pourrait-il accepter le fonctionnement démocratique du pays tout entier?» Pour l'ex-membre de l'instance exécutive du vieux parti, «il se confirme que M.Abdelaziz Belkhadem ne saurait continuer se prévaloir de la légitimité qu'il croit détenir en sa qualité de secrétaire général du FLN». Mais il suffit de fréquenter la base du FLN dans toutes les kasmate, à travers le pays, «pour se persuader qu'il n'a entre les mains qu'un FLN virtuel, le FLN historique dans lequel se reconnaissent les militants authentiques, lui échappant totalement». En guise de conclusion à son réquisitoire, Salah Goudjil a noté que «les militants regroupés en majorité dans le mouvement du redressement et de l'authenticité du FLN se considèrent comme partie prenante dans tout dialogue et débats futurs initiés par Son Excellence le président de la République».