En quatre ans, les 389 députés ont proposé moins de 20 projets de loi et quelque 7 commissions d'enquête. A quelques mois de la fin du mandat de la sixième législature, l'Assemblée populaire nationale (APN) s'est distinguée par un fait saillant: l'absentéisme des députés. Ce fait est devenu, au fil des jours et en raison de sa persistance, un phénomène ordinaire. A chaque séance, cette APN renvoie l'image d'une Assemblée fantôme désertée par ses locataires. Résultat: des textes de loi qui engagent l'avenir des corporations sont adoptés par quelques dizaines de députés seulement; la loi ne fixant guère un quorum pour valider les scrutins. Pourtant, le règlement intérieur de l'APN stipule que la présence de la majorité des députés est «nécessaire» pour la validité des scrutins. Or, en cas d'absence de quorum, le scrutin est reporté à une séance ultérieure n'excédant pas 12 heures. Cependant, au cours, de cette prochaine séance, le scrutin est validé et ce quel que soit le nombre des députés présents, fût-il un seul député. En d'autres termes, l'absentéisme n'influe pas sur le fonctionnement de l'APN étant donné qu'il peut juste bloquer les travaux (le vote des lois) pour une durée allant de 6 à 12 heures. Ce sont les aspects étranges d'un règlement intérieur d'une institution dont la vocation est de légiférer en matière de lois qui engagent l'avenir de tout un pays! Si rien n'oblige les députés à assister ne serait-ce qu'aux séances de vote et lever la main, car ils sont payés pour cela, il n'en demeure pas moins que la récurrence de ce phénomène pose problème. Pourtant, le règlement intérieur de l'Assemblée énonce, dans son article 64, que le député est tenu de participer aux séances ainsi qu'aux travaux de la commission dont il est membre. En outre, les demandes d'absence aux séances de l'Assemblée sont adressées au président et doivent impérativement être motivées, selon le même article. Toutefois, le règlement intérieur n'explicite pas la suite à donner aux absences répétées des députés. Ni sanction, ni aucune autre mesure disciplinaire. Ce qui fait, selon plusieurs locataires de la Chambre basse du Parlement, que des députés s'absentent soit sans même faire de demande, soit en ne procédant pas à l'établissement d'une simple procuration au nom d'un ami présent. Pire encore, selon un député, «les procurations peuvent se faire sen un simple coup de téléphone». Mais ce phénomène de l'absentéisme est, selon un député qui a préféré requérir l'anonymat, un faux problème si l'on ose le comparer aux véritables questions de l'heure. «Me concernant, si je ne viens pas à l'APN, ce n'est pas pour m'absenter. C'est un boycott pour des raisons politiques», précise notre interlocuteur avant de poser une pléthore de questions. Combien de députés ont engagé, malgré leurs salaires exorbitants, un secrétaire pour le seconder dans son travail? Combien de députés ont-ils ouvert des permanences dans leurs wilayas pour accomplir leurs missions? Et la question centrale est de savoir si les députés font leur boulot sur le terrain. Notre interlocuteur pose également la problématique des relations entre le Parlement et le gouvernement. En effet, quel est le poids du député au regard d'un ministre, face à un wali, se demande-t-il, rappelant que les représentants du peuple ne disposent pas de bureau à l'APN. «Parfois les ministres mettent plus de trois mois avant de répondre aux questions écrites des députés», souligne notre source. L'immobilisme des parlementaires est également un véritable problème. En quatre ans, les 389 députés n'ont proposé que moins de 20 projets de loi et n'ont déposé que quelque 7 propositions de création de commission d'enquête, toutes rejetées, à part la dernière en date, relative aux émeutes liées aux prix de l'huile et du sucre, de janvier dernier. Un bilan pour le moins catastrophique.