Jadis, le Ramadan était accompli dans la pure tradition musulmane où les mots clés comme pitié, convivialité et solidarité trouvaient leur pleine signification. Il est vrai qu'après une journée de privations, on organisait des veillées riches en activités culturelles et religieuses, en rencontres familiales et entre voisins. On n'oubliait guère les démunis dont les besoins étaient réellement pris en charge de façon à leur permettre de vivre, eux aussi, les joies du ramadan. On en profitait également pour aplanir les différends dans le but d'instaurer de bons rapports entre toutes les composantes de la société. Au marché, les commerçants répondaient correctement aux exigences de la rahma en appliquant des prix raisonnables et en proposant des produits de qualité. Pour leur part, les consommateurs étaient très disciplinés dans leurs approvisionnements puisqu'ils n'achetaient que les quantités de denrées alimentaires dont ils avaient besoin quotidiennement. Aujourd'hui, malheureusement, tout cela est devenu un fait rarissime pour des raisons liées, entre autres, à l'éclatement de la ville de Biskra en plusieurs cités éloignées les unes des autres, à la conjoncture difficile qui vit le pays et enfin à l'esprit mercantile des commerçants. La fréquentation du centre-ville après le f'tour, se limite généralement aux seuls habitués des lieux, car la plupart des citoyens préfèrent passer les soirées de ramadan chez eux devant leur petit écran. D'autant plus qu'il n'y a pratiquement rien qui puisse les attirer à l'extérieur. En effet, les activités culturelles et artistiques sont quasi inexistantes. Pourtant des dizaines de troupes locales ne demandent qu'à être sollicitées pour animer les veillées ramadanesques. Durant la journée, on enregistre une ruée indescriptible de citoyens accompagnés de leur progéniture dans les locaux commerciaux, notamment l'habillement et la chaussure. Il en est de même pour les marchés de fruits et légumes et les boucheries. Mais cela ne veut pas dire pour autant que les Biskris sont à l'abri du besoin. Bien au contraire, le nombre de nécessiteux atteint un seuil alarmant qui frappe de plein fouet cette région. De plus en plus de mendiants tendent la main le long des trottoirs et dans les lieux publics. Les actions habituelles de solidarité telles que le couffin du ramadan et les restos du CRA demeurent plutôt inefficaces face à l'aggravation du phénomène de la paupérisation qui touche des pans entiers de la société. La situation exige sans doute la mise en place d'une politique sociale bien réfléchie dès lors que les actions initiées jusque-là dans ce sens ont montré leurs limites.