Réminiscences Les veillées d?autrefois avaient leur charme. Le ramadan ne se résume pas uniquement à une pratique religieuse où l?individu est conduit à observer le jeûne, il est aussi un mois où les amis et les familles se rapprochent et se rencontrent le soir, dans des contextes différents, se livrant à des veillées, en improvisant diverses activités, ponctuant ainsi leurs soirées, leurs réunions conviviales et familiales. En ce sens, le ramadan acquiert une dimension culturelle, puisque les gens cultivent, tout au long du mois sacré, des habitudes, imaginent des situations, créent une ambiance d?une grande convivialité. Dans le temps, en évoquant les souvenirs de nos parents et même de nos aînés, l?aspect culturel du ramadan apparaissait protubérant, contrairement à aujourd?hui, où les gens se détournent des habitudes où les traditions ramadanesques semblent s?effilocher, se perdre dans l?oubli, parce qu?il n?y a pas eu une relève, une prise en charge de ce patrimoine que la nouvelle génération a hérité de l?ancienne. Jadis, racontaient nos parents, le ramadan avait une saveur, une senteur. Les veillées se déroulaient en famille. Les gens se rendaient visite, et pendant ces rencontres, chacun les alimentait, les animait selon l?inspiration du moment. Les hommes, entre eux, veillaient dans les cafés, jouaient aux dominos ou aux cartes. Certains cafés allaient même jusqu?à organiser des récitals de chaâbi. Se mettant en cercle, les femmes, surtout les jeunes, préféraient chanter et danser, leur chant était accompagné de musiques rythmées de percussions, tels la derbouka et le tar, quelquefois des cordes de la mandoline ou du ûd et, en d?autres moments, elles se livraient à leur jeu favori, qu?est la bouqala ou se racontaient des récits romanesques, des histoires romantiques relatant des exploits chevaleresques. Les femmes âgées, quant à elles, parlaient de la vie quotidienne. Les enfants improvisaient toutes sortes de jeux ; certains préféraient la compagnie de leur grand-mère qui leur racontait des histoires. Ils trouvaient en elle, en ce personnage devenant en un tour de verbe, à leurs yeux, un être surnaturel, une ouverture sur l?imaginaire, une évasion dans le fantastique. Sur un ton éloquent, elle les tenait en haleine, promettant à sa descendance de relater la fin du récit lors de la prochaine veillée. Ces rencontres se tenaient autour d?une table garnie de pâtisseries orientales, de sucreries et autres gourmandises. Une table réunissant les membres de la famille, les proches et même les amis. Le ramadan d?antan n?existe plus de nos jours où divers loisirs et lieux de rencontres ont supplanté les veillées d?autrefois, mais il persiste encore et toujours dans la mémoire de nos aînés.