Pyongyang a haussé hier le ton, menaçant de s´en prendre à son «frère ennemi» du Sud. Une tournure des événements, en vérité dangereuse d´autant plus que la Corée du Nord, après l´adhésion de la Corée du Sud à l´Initiative de sécurité en matière de prolifération (PSI), estime désormais caduc l´accord d´armistice de 1953 qui suspendit la guerre intercoréenne de 1950/53 sans pour autant y mettre fin, les deux pays étant officiellement toujours en guerre. La communauté internationale s´est en fait accommodée de cette situation de ni guerre ni paix qui, si elle a permis la cessation des hostilités entre le nord et le sud de la Corée, n´a rien résolu dans le fond, installant en revanche la région sur une poudrière avec la menace d´explosion à tout moment. Et tout donne à croire que ce moment approche dangereusement au regard des derniers développements survenus dans cette région du Sud-Est asiatique. Toutefois, le danger ne vient pas seulement, de la seule Corée du Nord, même s´il est ressenti comme le plus pressant, il émane également de nations disposant de l´arme nucléaire comme les Etats-Unis et la France ou encore Israël. En effet, si jusqu´à une date récente, les tenants de l´arme nucléaire affirmaient que celle-ci devait avoir un effet exclusivement dissuasif, il semble que ce n´est plus le cas puisque, autant Washington que Paris, n´hésitent plus à envisager l´usage de l´arme nucléaire pour la «protection d´intérêts vitaux». Ce qui veut dire que le développement de la technologie et la miniaturisation des armements atomiques ont rendu possible l´emploi de telles armes non plus à effet dissuasif mais préventif. Un pas que les Etats-Unis, en particulier, semblaient prêts à franchir. Le président américain sortant, George W.Bush, n´avait pas alors écarté la possibilité d´une attaque atomique contre l´Iran pour stopper son programme nucléaire. Israël a renchéri menaçant à son tour d´attaquer l´Iran. Il y a de fortes probabilités en fait qu´Israël ait utilisé - lors de la guerre contre le Hezbollah libanais en juillet 2006 et de l´agression contre la Bande de Ghaza en décembre 2008 - de telles armes à faible puissance nucléaire et notamment des bombes à fragmentation qui ont fait beaucoup de dégâts à Ghaza et dans le Sud du Liban. De même, les Etats-Unis ont utilisé ce genre d´armes en Irak et en Afghanistan. Aussi, il ne sert à rien de focaliser sur l´Iran et la Corée du Nord lorsque des pays, autrement en avance, préparent tranquillement des armes encore plus perfectionnées qui pourraient à terme rendre une guerre nucléaire non seulement probable mais banaliserait l´usage de telles armes que l´on prétend vouloir prohiber. De fait, dès qu´il est question de contrôle ou seulement de droit de regard sur le nucléaire, les grandes puissances se rebiffent et sont réticentes à toute vérification de la part des Nations unies ou d´organisations indépendantes. Aussi, le rejet du Ctbt (interdiction totale des essais nucléaires) par le Sénat américain en 1999 a remis en question l´interdiction des essais nucléaires expérimentaux et ouvert une brèche dans laquelle se sont introduits d´autres Etats. Dès lors, plus aucun pays n´accepte aujourd´hui l´axiome des puissants: «Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais». Aussi, si l´on veut débarrasser le monde du danger que représente l´arme nucléaire, il faudrait donner l´exemple en acceptant une éthique de la pratique et surtout bannir le privilège que s´accordent certains Etats à développer outre mesure leur capacité nucléaire tout en interdisant cette capacité à des pays tiers. En fait, le désarmement ne sera crédible que le jour où la règle deviendra universelle et s´appliquera de la même manière aux grands et petits Etats. On en est encore loin. Avec pour résultat le fait de chacun à vouloir se prémunir en ayant sa propre arme de dissuasion. Les proliférants ce sont ceux qui prétendent mettre un terme à la prolifération nucléaire!