Quel est le mur dont nous pourrons bien célébrer la chute? La question ne se pose pas pour les Allemands. Par ricochet, toute la sphère occidentale du globe a trouvé dans la chute du mur de Berlin, il y a vingt ans, un motif de célébration et de satisfaction. Cela représentait pour l´Occident le symbole de la victoire contre le communisme. Or, des peuples entiers attendent toujours d´être débarrassés de murs beaucoup plus honteux. En Palestine. Plus près de nous, au Sahara occidental. L´euphorie générale qui a caractérisé cet événement ne doit pas faire oublier les souffrances de générations entières. Le Maroc ne vient-il pas de déclarer par le biais de son souverain qu´il entend serrer davantage la vis aux Sahraouis? La réponse ne lui vient pas que de la rive sud de la Méditerranée. C´est un journal italien qui a tenu à rappeler qu´un mur, sept fois plus grand que celui de Berlin, continue de diviser un pays et des familles. En Palestine, la pression n´est pas prête d´être relâchée sur les populations des territoires occupés. Là aussi, c´est par le biais de panneaux en béton qu´on se charge de stigmatiser tout un peuple allant même jusqu´à l´affamer. Dans les deux cas, les pressions des Occidentaux se font de plus en plus timides. Leurs positions frôlent même la complicité dans ces véritables campagnes de déni de droit. D´autres pays sont aussi divisés en deux du fait de l´occupation étrangère. Les Syriens attendent toujours de récupérer leur Golan. La diplomatie n´a pas été en mesure, jusque-là, de mettre fin à ces injustices. Ailleurs dans le monde, ce sont d´autres murs qui séparent les Américains du Nord de leurs voisins du Sud. Car la pauvreté est tout aussi bien un mur qui n´a nul autre pareil pour établir une distinction entre les humains. Mais les âmes charitables ne sont pas nombreuses à s´élever contre ce genre de discrimination et d´injustice, si tant est que cela pourrait être une affaire de charité. Chez nous aussi, ce ne sont pas les murs de ce genre qui manquent. Il faut préciser qu´ils ne servent pas que d´appui aux hittistes. Les murs de l´incompréhension sont ceux qui nécessitent le plus d´ingéniosité pour être abattus. Et tout porte à croire que nous sommes mal partis pour pouvoir briser les chaînes de ce boulet que nous portons au pied. Ce n´est pas un rideau de fer qui empêche les enfants d´une même nation de communiquer. C´est plutôt un mur de glace qui se dresse à la face de tous ceux qui cherchent à établir des contacts. L´exemple le plus récent de ces barrières, qui nous est fourni, est celui du dialogue de sourds entre syndicalistes du secteur de l´éducation et le ministre de l´Education nationale. Alors si on veut célébrer, à notre façon, la chute d´un mur, on sait par lequel il faut commencer.